C. Hrelescu, T. K. Sau, A. L. Rogach, F. Jäckel, G. Laurent, L. Douillard et F. Charra
En optique, les lois de la diffraction imposent une échelle spatiale de l'ordre de la longueur d'onde. Ainsi, sous excitation optique dans le domaine visible (longueur d'onde d'une fraction de µm), les objets métalliques de dimensions nanométriques sont usuellement considérés comme uniformément éclairés. Les expériences réalisées au SPCSI montrent que les nano-objets ont une signature spatiale et spectrale différente selon qu'ils sont observés en champ lointain (tel que nous les voyons avec nos yeux au microscope optique) ou en champ proche (en observant les mêmes objets en microscopie d'électrons de photoémission, PEEM). Ce résultat très fondamental est aussi une importante contribution à une meilleure maitrise de la « plasmonique » et de la « microscopie en champ proche », qui ouvre la voie vers la réalisation d'une optique intégrée à l'échelle nanométrique, couplant signaux optiques et électriques (opto-électronique).
Les expériences réalisées ont consisté à étudier la réponse optique de nano-étoiles d’or obtenues par chimie colloïdale. Ces objets se présentent sous la forme d’un cœur sphérique doté de 5 à 8 pointes acérées. Les diamètres pointe à pointe sont voisins de 150 nm. L'étude s’appuie sur la mise en œuvre de 3 microscopies/spectrométries complémentaires :
- la microscopie LEEM/PEEM (Low Energy Electron/PhotoEmission Electron Microscopy), technique de choix pour la cartographie spatiale du champ proche optique,
- la microscopie électronique à balayage MEB,
- la microscopie optique champ sombre DFM (Dark Field Microscopy), à même d’obtenir la réponse spectrale d’objets de tailles réduites.
Sous excitation optique, de tels nano-objets métalliques de dimensions inférieures à la longueur d’onde incidente manifestent des propriétés remarquables, liées aux oscillations collectives des porteurs de charge (résonances plasmons). Ces résonances se caractérisent notamment par l’émergence de points chauds, zones d’extension spatiale très réduites, qui sont le siège d’un champ électromagnétique intense au regard du champ incident.
La figure 1 illustre le comportement générique de nano-étoiles sous excitation optique. Les figures 1.(a, d) rendent compte des topographies respectives des objets, les figures 1.(b, e) donnent la mesure en LEEM/PEEM de l'émission électronique locale. Cette émission électronique est le reflet direct de l'intensité du champ proche optique. La superposition des signatures topographique et optique permet de localiser les « points chauds » aux extrémités des pointes des étoiles.
Figure 1.
- a) Image LEEM nano-étoile, énergie cinétique des électrons 1.8 eV,
- b) Image PEEM composite, superposition de deux polarisations (p et p + 40°), de la nano-étoile sous excitation optique à 730 nm. •
- c) Superposition des images (a) et (b);
- d) Image MEB d'une autre nano-étoile,
- e) Image PEEM obtenue par superposition des cartographies champ proche sous excitation optique (860 nm, polarisations p – 42°, p + 48° et 780 nm, polarisation p)
- f) Superposition des images (d) et (e).
Pour toutes les images PEEM, les caractéristiques de l’excitation sont une incidence rasante α = 75°, une densité de puissance de 125 MW/cm². La flèche indique la direction et le sens de la projection du vecteur d’onde du faisceau dans le plan de l’échantillon. La barre blanche donne l'échelle et représente 100 nm.
En jouant sur la longueur d’onde et/ou la polarisation du champ de la source d’excitation, il est possible d’exciter sélectivement les différentes pointes d’un même objet. Un exemple d’excitation sélective d’une nano-étoile (nano-étoile II) est rapporté figure 2. Ce type d’approche est généralisable par la détermination des dépendances spectrales de chacune des pointes. D'un point de vue plus fondamental, un examen attentif des mesures permet d’identifier des différences spectrales (décalage des résonances) entre les observations des nano-étoiles en champ proche (absorption, microscopie de photoémission d’électrons) et en champ lointain (diffusion, microscopie en champ sombre). Ces différences illustrent l’inadéquation de l’approximation quasi-statique (champ électrique de l'onde incidente supposé éclairer uniformément l'objet), usuellement avancée pour ce type de physique et montre qu'en optique « nanométrique », la prise en considération des effets de taille et de forme des particules est indispensable.
- a) 860 nm, polarisation p,
- b) 860 nm, polarisation p – 72°,
- c) 760 nm, polarisation p + 48°,
- d) 860 nm, polarisation p – 42°
- e) Diagramme des polarisations PEEM
- f) Superposition des images nomenclature des pointes de la nano-étoile II. Le polygone rouge souligné de points rend compte des positions des points chauds. L’incidence du LASER est rasante α =75°, la densité de puissance utilisée équivaut à 125 MW/cm²
Ces observations multi-microscopies réalisées sur des objets nanostructurés apportent une contribution essentielle à la maitrise de la « plasmonique » et de la « microscopie en champ proche » , qui ouvre la voie vers la réalisation d'une optique intégrée à l'échelle nanométrique, couplant signaux optiques et électriques (opto-électronique).
Référence :
Selective excitation of individual plasmonic hotspots at the tips of single gold nanostars, C. Hrelescu1, T. K. Sau1, A. L. Rogach1, F. Jäckel1,*, G. Laurent2, L. Douillard2,*, F. Charra2, Nano Lett. 11(2) (2011) 402. |
1Photonics and Optoelectronics Group, Department of Physics and CeNS, Ludwig-Maximilians Universität München, Amalienstr. 54, D-80799 München, Germany
2CEA, IRAMIS, Service de Physique et Chimie des Surfaces et Interfaces, F-91191 Gif sur Yvette, France