Brèves de l’IRAMIS n° 337 (Juillet-août 2024)

Brèves de l’IRAMIS n° 337 (Juillet-août 2024)

Contact : Françoise Damay (LLB/NFMQ)

Les grenats de terres rares sont connus pour leurs propriétés magnétocaloriques : les moments magnétiques y sont utilisés comme « réservoir d’entropie ». Après l’application d’un champ magnétique capable de polariser ces moments, le retour à un état paramagnétique en champ nul s’accompagne d’un refroidissement du matériau. Dans ces composés, les propriétés magnétiques sont essentiellement régies par le champ cristallin, lui-même lié à la structure de la cage formée par les anions qui entourent un ion Dy3+ (figure (a)). On peut par exemple passer d’une anisotropie axiale très forte dans Dy3Al5O12 (figure(a)) à une anisotropie planaire XZ, dans Dy3Al5O12. Les calculs réalisés dans l’approximation des charges ponctuelles confirment que la distorsion de l’environnement du Dy3+ conduit à une anisotropie axiale, le long des axes X, Y ou Z (figure (b)). Les frontières entre ces régions, sont caractérisées par des anisotropies planaires XZ et YZ.

Figure (a) Détail de l’axe d’anisotropie du moment du Dy3+ dans le cas axial Z, axe aligné le long de la direction de la liaison la plus courte entre un site Dy (violet) et un site C (vert) de la structure grenat. (b) : Variations (calculées) en fonction de la distorsion de la cage DyO8, de l’anisotropie du Dy3+: les zones rouge, bleue et verte correspondent à une anisotropie axiale Z, X et Y). Les symboles jaunes correspondent aux quatre compositions étudiées. La zone grisée montre la frontière entre deux zones d’anisotropie axiale.

L’effet magnétocalorique calculé augmente nettement près de cette frontière, ce qui motive la recherche de nouveaux composés à base de Dy, en vue d’applications magnétocaloriques, et caractérisés par d’autres distorsions de la cage anionique. Dans cette optique, plusieurs grenats de dysprosium Dy3Al5O12 (B = In, Sc, Te, C = Ga, Al, Li) ont été étudiés. La distorsion de la cage DyO8 favorise systématiquement dans ces composés une anisotropie axiale Z (figure (b)), se traduisant par un large gap entre le fondamental et la première excitation de champ cristallin, observable en diffusion inélastique de neutrons. Ces résultats montrent que pour se rapprocher des frontières XZ et YZ, les cations B et C de la structure grenat doivent être choisis de façon à minimiser la distorsion de la cage DyO8.

I. Kibalin et al., Phys. Rev. Research 2, 033509 (2022)
Contact : Françoise Damay (LLB/NFMQ)


Brèves des labos

Florent Goulette et Lisa Shafroth, étudiants à l’Ecole Polytechnique, ont obtenu le Prix international Oldfield 2023 de la Society of Glass Technology pour leurs travaux intitulés « Photoluminescence-based method to sort colourless roman glasses » effectués durant leur projet de Master en laboratoire au LSI avec Nadège Ollier. Ce projet vise à proposer une nouvelle méthode basée sur la photoluminescence pour trier rapidement les verres incolores de l’époque romaine selon la nature du décolorant utilisé (Sb, Mn ou Sb/Mn).

Avant le grand arrêt de l’ILL prévu du 10 juillet 2024 au 1er avril 2025, le LLB a tenu à fêter le 4 juillet la réussite de ses équipes avec le démarrage à l’ILL dans les temps prévus de ses deux spectromètres : SAM (Diffusion de Neutrons aux Petits Angles) et SHARPER (Spectromètre Hybride Alpes-Région Parisienne Étendu en Résolution).
Merci à tous ceux qui ont contribué à ce succès.

Contact : Alain Menelle (LLB).


Jeune chercheur

À la suite de ses études en sciences des matériaux à l’Université Paul Sabatier (Toulouse), Mélanie François a obtenu son doctorat en 2021 à l’Université de Bourgogne (Dijon). Après deux ans d’ATER, elle a rejoint en 2023 le laboratoire LICSEN au sein du NIMBE. Sa thématique de recherche porte sur le développement de matériaux pour les piles à combustible de type PEM (Proton Exchange Membrane) et sur la caractérisation des piles PEM élémentaires en fonctionnement, avec un intérêt particulier pour leurs caractérisations électrochimiques par spectroscopie d’impédance.

Contact CEA : Mélanie François (NIMBE/LICSEN).

Les piles à combustible à membrane échangeuse de protons (PEM) suscitent un intérêt constant pour répondre aux défis de la transition énergétique. Leur mise en œuvre à grande échelle dépend de la résolution d’un certain nombre de défis techniques, notamment le développement de matériaux sans ou à faible chargement de platine, l’optimisation de leur mise en forme et l’augmentation de leur durabilité. Les recherches conduites au LICSEN visent à répondre à ces enjeux en développant des supports de catalyseurs en carbone hautement électroactifs permettant de réduire la quantité de platine ou d’utiliser des catalyseurs sans métaux nobles. Elles visent également à perfectionner les techniques de mise en forme des différents constituants des PEM de manière à optimiser les microstructures et les interfaces des différents constituants, des assemblages membrane-électrodes aux plaques bipolaires. Enfin, les activités se concentrent sur la caractérisation des piles PEM en fonctionnement par des techniques électrochimiques (voltampérométrie cyclique et spectroscopie d’impédance) et des caractérisations post-mortem.

Spectre d’impédance (diagramme de Nyquist : Z » : Im(Z) – Z’ : Re(Z) ) d’une pile PEM en fonctionnement à 0.6 V, au début de l’essai et au bout de 15h. La spectroscopie d’impédance
permet ici de montrer que la chute des performances de la pile est en majorité due à une
dégradation de la cathode, identifiée par l’augmentation de la résistance.

La spectroscopie d’impédance est largement employée dans la caractérisation des piles à combustible, et, de manière plus générale, dans les systèmes électrochimiques. La technique consiste à appliquer un signal sinusoïdal (courant ou tension) à différentes fréquences à un système électrochimique et à mesurer la réponse résultante (tension ou courant). Le domaine de fréquences permet de différencier les divers processus élémentaires selon leurs temps de relaxation caractéristiques. Ainsi, dans les PEM, on peut ainsi distinguer les processus relatifs à la couche catalytique anodique de ceux relatif à la couche cathodique, les phénomènes d’interface sont également identifiables dans certains cas. Un circuit électrique équivalent permet d’exploiter les données d’impédance. L’enjeu principal est d’identifier et comprendre les mécanismes limitant les performances et ceux responsables de la dégradation.   

Contact CEA : Mélanie François (NIMBE/LICSEN).


Lors de sa conférence Nobel au CEA-Saclay, Anne L’Huillier a tenu à remercier le CEA pour toutes ces années où les possibilités offertes par son laboratoire de Saclay lui ont permis de conduire ses recherches, et l’ont amenée à la découverte du phénomène de génération d’harmoniques d’ordres élevés (GHOE).

De même, Pierre Agostini rappelle dans un grand entretien au Paris-Saclay Submit d’avril 2024, toute sa carrière au CEA passée dans son laboratoire saclaysien au sein de l’équipe « multiphotons », ponctuée de 1968 à 2004 de nombreux résultats scientifiques majeurs : ionisation au-delà du seuil, méthode RABBIT de mesure de durée d’impulsion attoseconde,…

C’est avec cette reconnaissance de tout ce que le laboratoire CEA-LIDYL leur a apporté pour mener à bien leurs travaux récompensés par l’Académie Royale de Suède, qu’Anne L’Huillier et Pierre Agos – tini, lauréats du Prix Nobel de Physique 2023, ont décidé de lui remettre un exemplaire de leur prestigieuse médaille. Merci à eux !


Directeur de la publication : F. Daviaud – Comité de rédaction : L. Barbier, G. de Loubens – Réalisation : C. Becquet.