Ludovic Douillard et Fabrice Charra, DRECAM/SPCSI/Groupe Nanophotonique
La réduction de la taille d’un objet métallique se traduit par d’importantes modifications de ses propriétés physiques, et en particulier de sa réponse à une excitation optique. Ainsi, pour des objets de tailles significativement inférieures à la longueur d’onde incidente, l’un des effets les plus remarquables est l’émergence de résonances au sein du spectre d’absorption. Celles-ci, dénommées résonances plasmon, correspondent à un processus d’oscillation collectif des électrons, tel que décrit par Mie au début du XXème siècle [Mie 1908]. Dans le cas de métaux nobles, ces résonances se situent dans le spectre visible, un phénomène mis à profit dès l’antiquité pour l’obtention de verres colorés par inclusion de particules métalliques.
Aujourd’hui, l’essor des nanotechnologies entraîne un vif regain d’intérêt pour de tels phénomènes, désormais regroupés au sein d’une nouvelle thématique baptisée du nom de plasmonique. Au-delà de ses aspects fondamentaux, le sujet possède un large éventail d’applications technologiques, de la fabrication de composants optiques (polariseurs, guides d’onde…) à l’analyse génétique (détecteur biochimique…).
La physique mise en jeu porte sur le couplage entre les électrons de conduction et le champ électromagnétique associé au rayonnement incident. Aux tailles considérées, inférieures à la longueur d’onde du rayonnement, les électrons sont confinés au sein d’un objet individuel et le champ électromagnétique est perçu comme uniforme, spatialement et temporellement. Le caractère oscillant de l’excitation se traduit par une mise en mouvement collective et cohérente des porteurs de charges : la résonance plasmon L’étape suivante consiste en la réalisation d’assemblages de tels objets, qui sous excitation optique sont le siège de modes de plasmon couplés, spécifiques de la géométrie choisie.
Les méthodes d’étude usuelles relèvent essentiellement de variantes de la microscopie optique en champ proche (SNOM) où le champ électrique est mesuré à l’aide d’une sonde locale (fibre optique…). Le point fort de ces techniques, à savoir leur résolution spatiale est contrebalancé par les perturbations significatives liées à la présence de la sonde.
Dans un effort pour nous affranchir de ces perturbations inhérentes aux microscopies à champ proche, nous montrons que la microscopie de photoélectrons PEEM (Photo-Emission Electron Microscopy) ouvre des perspectives très intéressantes : il s’agit en pratique de cartographier en deux dimensions la distribution de photoélectrons émise par une surface. Le principe d’imagerie relève de l’optique électronique et ne fait intervenir aucune sonde physique dans l’espace de mesure. Pour le système étudié, la distribution des électrons émis correspond à un processus de relaxation non radiatif des modes de plasmon excités à la surface de l’assemblage. Les résultats expérimentaux sont d’emblée du niveau de ceux obtenus par microscopie optique en champ proche (résolution 50 nm) et les degrés de liberté expérimentaux permettent d’accéder à un grand nombre de géométries d’excitation (incidences rasante, normale…). La mise à l’épreuve de la microscopie de photoélectrons comme outil de caractérisation du champ proche optique se poursuit actuellement dans le cadre de l’étude d’objets individuels et ou d’assemblages de géométries particulières.
[MIE 1908] G. Mie, Ann. Phys. (Leipzig) 25 (1908) 377.
Contacts : Ludovic Douillard et Fabrice Charra