La déposition d’une couche mince de GexSi1-x sur un substrat de Si peut permettre de miniaturiser les technologies CMOS [1]. Cela requiert néanmoins l’obtention de films contenant très peu de défauts. Or la différence de paramètre cristallin entre le germanium et le silicium induit la formation de dislocations qui détériorent fortement les propriétés électroniques du système sauf si celles-ci se trouvent uniquement à l’interface GexSi1-x/Si. Dans ce système, il y a principalement deux types de dislocations qui diminuent la contrainte dans le film. Les dislocations coins ont la plus forte capacité de relaxation du film mais elles sont sessiles. Les dislocations 60° sont moins efficaces pour relaxer le film mais elles sont mobiles. Expérimentalement il est possible de former un dépôt de Ge/(001)Si entièrement relaxé grâce à la présence d’un réseau dense et organisé de dislocations coins à l’interface Ge/Si [2]. Nous nous proposons d’utiliser une modélisation à l’échelle atomique de ce système afin d’étudier le mécanisme de formation de ce réseau qui reste encore largement incompris et spéculatif.
La longue portée des effets élastiques des dislocations nécessite l’utilisation d’un système de grande taille qui ne peut être modélisé entièrement par la théorie de la fonctionnelle de la densité (DFT). A notre connaissance, il n’existe pas de potentiel empirique permettant de modéliser précisément à la fois les interactions Ge-Ge, Si-Si et Ge-Si en présence ou non d’une dislocation. Nous utilisons donc une approche multi-échelle qui consiste à corriger des résultats obtenus à partir d’un potentiel empirique à l’aide de calculs DFT.
Nous utilisons le potentiel de Stillinger-Weber (SW) [3,4] qui reproduit bien les propriétés élastiques du germanium et du silicium mais qui surestime significativement l’énergie de coeur d’une dislocation. Par comparaison avec des calculs en DFT réalisées sur des systèmes de petites tailles contenant des dislocations linéaires, nous estimons cette erreur pour différentes orientations d’une dislocation. Cela nous permet ensuite de corriger les résultats obtenus à l’aide du potentiel SW.
Nous modélisons un film mince (19 mono-couches) de Ge déposé sur un substrat de Si. Nous utilisons une méthode d’optimisation globale de chemins de transition pour trouver les chemins ayant la plus faible énergie d’activation entre une configuration pseudo-morphique et une configuration contenant une dislocation coin à l’interface. Nous identifions deux mécanismes pour la formation de dislocations coins qui étaient jusqu’à présent inconnus.
Nous montrons en particulier que l’orientation des dislocations traversantes associées aux dislocations d’interface 60° dépend de la contrainte dans le film. Ainsi aux fortes contraintes ces dislocations traversantes sont des dislocations 60° alors qu’à plus faible contrainte elles ont une orientation vis. Ce changement d’orientation des dislocations traversantes modifie le mécanisme de formation des dislocations coins. En conséquence, le mécanisme principal de formation des dislocations coins dépend de la contrainte initiale dans le film et donc de sa composition en Ge.
[1] Y. B. Bolkhovityanov et al., Semiconductors, 42 , 1 (2008)
[2] T. F. Wietler, E. Bugiel, and K. R. Hofmann, Appl. Phys. Lett., 87 , 182102 (2005)
[3] F. H. Stillinger and T. A. Weber, Phys. Rev. B, 31 , 5262 (1984)
[4] M. Laradji et al., Phys. Rev. B, 51 , 4894 (1995)
Department of Applied Physics, Aalto University, Finland