Brèves de l’IRAMIS n° 321 (Octobre 2022)

Brèves de l’IRAMIS n° 321 (Octobre 2022)

Vers une meilleure compréhension du mécanisme de formation sous irradiation de défauts optiquement actifs dans le nitrure d’aluminium (AlN)

Mamour Sall (CIMAP/MADIR)

SPEC

Les semi-conducteurs nitrures sont envisagés pour de nombreuses applications dans l'émission et la détection de lumière, dans les domaines du bleu et de l’ultraviolet (UV). L’AlN, grâce à sa large bande interdite, est utilisé comme substrat natif pour les diodes électroluminescentes dans l’UV. À ce titre, une attention particulière est portée sur les défauts absorbant dans l’UV, notamment ceux responsables de la bande d'absorption à 4,7 eV. Par ailleurs, ces défauts sont proposés comme potentiels qubits pour des applications dans les technologies de l'information quantique. Ils peuvent être créés pendant la croissance du matériau, en présence d’impuretés, ou sous irradiation ionique par une synergie entre les dépôts d’énergie électronique (Se) et nucléaire (Sn).

Création des défauts optiquement actifs à 4.7 eV. Evolution du coefficient de synergie kβ entre les dépôts d’énergie électronique (Se) et nucléaire (Sn) en fonction de l’atmosphère d’irradiation.

Récemment, nous avons étudié les effets combinés entre la création radio-induite de ces défauts et la diffusion d’impuretés sous irradiation à travers la variation de l’atmosphère d’irradiation (O2 et gaz inertes). La diffusion de ces gaz dans la couche d’AlN étant favorisée sous excitations électroniques, un choix avisé permet soit l’activation (O2) soit l’inhibition des défauts optiquement actifs (sous Ar ou He) (figure). Sous atmosphère d’oxygène l’efficacité de création des défauts augmente de 2 ordres de grandeur par rapport à des irradiations sous vide (oxygène résiduel). À contrario, les atmosphères d’Ar et d’He inhibent la création des défauts, probablement en occupant les sites de l’oxygène. Ces résultats soutiennent l’hypothèse selon laquelle ces défauts sont constitués par des complexes oxygène-lacune formés lors de la réaction de l'oxygène avec les lacunes radio-induites, et ouvrent la voie à un contrôle de leurs propriétés optiques, nécessaire en vue d’une potentielle future utilisation comme qubits.

Contact : Mamour Sall (CIMAP/MADIR)


Brèves des labos

SPEC

Prix Jacques Herbrand 2022 de l'Académie des Sciences décerné à Emmanuel Flurin du SPEC

Le Prix Jacques Herbrand 2022 de l'Académie des Sciences a été remis à Emmanuel Flurin du « Groupe Quantronique » du SPEC le 18 octobre 2022. Le travail d'Emmanuel Flurin cherche à créer de nouveaux circuits quantiques supraconducteurs pour détecter la lumière dans le domaine micro-onde, gamme de longueur d'onde privilégiée pour manipuler l'information quantique sous la forme de « qubit ». À des températures proches du zéro absolu, il a conçu un capteur capable de compter un à un et sans discontinuer les photons micro-onde. Cet outil est aujourd'hui suffisamment sensible pour détecter la réponse d'un spin unique au sein d'un cristal ou d'un objet biologique, ce qui peut permettre d'exploiter la cohérence quantique extraordinaire des niveaux de spin électronique ou nucléaire dans le traitement de l’information quantique. Toutes nos félicitations à Emmanuel !

LSI

Bourse FRANCE L'Oréal-UNESCO « Pour les Femmes et la Science » 2022 attribuée à Marie Cherasse du LSI

Chaque année, le programme « Jeunes Talents France » récompense 35 femmes scientifiques talentueuses aux niveaux doctorat et post-doctoral, affiliées à un laboratoire français. Marie Cherasse figure parmi les Jeunes Talents Françaises 2022. Ses travaux de thèse portent sur les « Dynamiques ultrarapides dans les pérovskites hybrides », en partenariat avec l’Institut Fritz Haber à Berlin, sous la direction de Luca Perfetti. Son objectif est de comprendre et d’améliorer les propriétés des « pérovskites », matériaux capables de convertir efficacement le rayonnement solaire en électricité, et qui pourraient également être utilisés comme composants de LEDs ou de détecteurs de rayons X. Toutes nos félicitations à Marie Cherasse pour son parcours !


Une nouvelle source de lumière cohérente dans l’extrême ultraviolet à très haut taux de répétition

Xu Liu (Lydil/Atto et Imagine Optic)

LYDIL

La génération d’harmoniques laser d’ordre élevé est une méthode aujourd’hui bien établie pour construire des sources de rayonnement cohérent dans le domaine de l’extrême ultraviolet (EUV, 10-100 nm) compactes par rapport aux grands instruments tels que les synchrotrons et les lasers à électrons libres. Les harmoniques sont obtenues en focalisant un laser infrarouge femtoseconde intense dans un milieu gazeux. Les principaux freins à la généralisation de ces sources sont liés à la complexité des lasers utilisés ainsi qu’à leur faible taux de répétition, qui rendent impossibles de nombreuses applications.

Entrée de la cellule de génération d’harmoniques laser, avec en insert le profil spatial du rayonnement EUV. (crédit photo : L. Godart/CEA)

Xu Liu met au point une ligne de lumière basée sur un laser fibré commercial, qui délivre des impulsions femtosecondes de 240 µJ avec une très haute cadence de 100 kHz. Les tout premiers photons EUV ont pu être observés en juillet 2022, sur un dispositif simplifié au maximum afin de favoriser sa stabilité et la facilité d’utilisation. Le spectre émis présente un maximum autour de 27 nm, avec un flux de photons de l’ordre de 2×1010 photons/seconde.

L’une des applications de cette ligne de lumière sera de développer de nouvelles techniques de microscopie basées sur l’imagerie par diffraction cohérente (CDI). Le but est de s’affranchir des aberrations introduites par les optiques traditionnelles en utilisant la diffraction du rayonnement EUV cohérent par l’échantillon, couplée à des algorithmes numériques qui reconstruisent l’image de l’objet. La ptychographie est une extension très prometteuse de l’imagerie CDI qui permet d’avoir un champ de vision plus large en effectuant un balayage du faisceau sur l’objet. Xu Liu développe une version « large bande » de la ptychographie afin d’exploiter la large bande spectrale caractéristique de la génération d’harmonique. Pour cela il est nécessaire de « monochromatiser » le signal de diffraction pour retrouver les propriétés de cohérence indispensables à l’imagerie CDI. Ceci est possible à l’aide d’un algorithme de monochromatisation développé par le groupe Atto du LIDYL.

Contact : Xu Liu (Lydil/Atto et Imagine Optic).


Directeur de la publication : F. Daviaud – Comité de rédaction : M. Soyer, G. de Loubens – Réalisation : C. Becquet.