Brèves de l’IRAMIS n° 310 (Septembre 2021)

Brèves de l’IRAMIS n° 310 (Septembre 2021)

Des réseaux de particules sub-nanométriques d’argent aux propriétés optiques uniques

Julien Cardin (CIMAP/NIMPH)
CIMAP

Selon leurs dimensions, les nanoparticules d’argent métallique sous lumière incidente montrent, soit des résonances plasmoniques pour des particules de dimension allant jusqu’à quelques nanomètres, soit un comportement du type semi-conducteur pour les agrégats de dimensions sub-nanométriques. Le comportement plasmonique va donner lieu à des propriétés caractéristiques de diffusion et d’absorption de la lumière, ou de localisation de champ électromagnétique. La réduction de la taille des particules métalliques à une longueur d’onde inférieure à la longueur d’onde de Fermi conduit à un écartement des niveaux d’énergie, jusqu’à dépasser l’énergie d’activation thermique (kBT). Ceci conduit, comme dans les semi-conducteurs, à une bande d’énergie interdite dont la largeur dépend de la taille des particules et conduit à des nanoparticules d’argent luminescentes.

(a) et (b) : Structure cristalline de la Nasicon α- et β-Li1.15Zr1.85Y0.15(PO4)3 (c) Mise en évidence des deux polymorphes α et β dans la Nasicon par RMN MAS du phosphore 31P. (d) Conductivité ionique totale mesurée par spectroscopie d’impédance complexe sur une Nasicon composée 70% α et 30% β.

Dans le cadre d’une collaboration de l’équipe NIMPH du CIMAP avec les laboratoires LCS et CRISMAT de Caen, nous avons étudié ces nano-objets, aux dimensions où la transition entre le comportement métallique et semi-conducteur a lieu. Nous avons démontré une nouvelle stratégie de préparation de particules d’argent sub-nanométriques connectées, via une réduction électrochimique sélective photo-assistée de cations d’argent dans des cages de zéolite X de type faujasite. Ces objets ont été étudiés par différentes techniques de caractérisation structurale, de spectroscopie optique et de modélisation, ce qui a permis de montrer que les particules sub-nanométriques d’argent, formées à partir d’amas d’Ag connectés à travers des canaux de zéolite, avaient un comportement optique unique. Leurs propriétés de luminescence et de résonance plasmonique sont potentiellement intéressantes pour diverses applications dans les domaines de la conversion d’énergie, de l’imagerie et du biomédical.

Contacts : Julien Cardin (CIMAP/NIMPH).


SPEC

Observation du dipôle électrique lié aux ondes de spin dans un ferro-aimant de Hall quantique

François Parmentier, Patrice Roche et Preden Roulleau (SPEC/GNE)


En présence d’un champ magnétique intense, et à basse température, les électrons du graphène peuvent voir leurs moments magnétiques, ou spins, tous parfaitement alignés dans la même direction. Les excitations élémentaires de ces aimants parfaits, appelées ondes de spin, sont des objets intrinsèquement magnétiques, qui possèdent néanmoins un aspect électrostatique, jamais observé jusqu’à ce jour. Les chercheurs du groupe de Nanoélectronique du SPEC, en collaboration avec l’IPhT, le NIMS et NTT-BRL (Japon), ont pu mettre en évidence le dipôle électrique des ondes de spin en utilisant un interféromètre électronique de Mach-Zehnder, réalisé dans un échantillon de graphène ultra-propre, comme détecteur de charges extrêmement sensible.

(a) Principe de l’expérience: une onde de spin (à gauche) est envoyée vers un interféromètre de Mach-Zehnder électronique (à droite, les deux bras de l’interféromètre sont représentés en bleu et rouge). Le dipôle électrique de l’onde de spin (double flèche jaune et bleue), perpendiculaire à la direction de propagation de l’onde, perturbe un des bras de l’interféromètre. (b) Courant transmis au travers de l’interféromètre, en fonction du champ magnétique B et de la tension contrôlant l’émission d’onde de spin V. Au-delà de la tension de seuil VE, les ondes de spin sont émises vers l’interféromètre, et les franges d’interférences se décalent.

Lorsqu’une onde de spin se rapproche de l’interféromètre, son dipôle électrique intrinsèque agit comme un champ électrique local qui peut modifier les positions relatives des deux bras de l’interféromètre d’une fraction de nanomètre. Ce déplacement, bien que très faible, modifie fortement les franges d’interférences du courant traversant l’interféromètre. En observant cette modification des franges d’interférences lorsque des ondes de spin sont générées dans l’échantillon, les chercheurs du groupe de Nanoélectronique ont non seulement pu identifier la présence du dipôle électrique, mais également obtenir des informations quantitatives sur les ondes de spin, par exemple leur statistique d’émission. Cette expérience, à l’interface entre deux domaines de recherche fondamentale très actifs (la physique quantique mésoscopique et la spintronique), offre un regard nouveau sur la compréhension profonde des systèmes magnétiques.

Contact : François Parmentier, Patrice Roche et Preden Roulleau (SPEC/GNE).


Directeur de la publication : F. Daviaud – Comité de rédaction : M. Soyer, G. de Loubens – Réalisation : C. Becquet.