Brèves de l’IRAMIS n° 287 (Mai 2019)

Brèves de l’IRAMIS n° 287 (Mai 2019)

Diffraction de neutrons froids à ultra basses températures


Françoise Damay (LLB/NFQM) et Philippe Boutrouille (LLB/NFQM)

LLB

Un nouvel environnement échantillon sur le diffractomètre G4.1 permet, depuis février 2019, de réaliser des mesures de diffraction des neutrons sur des échantillons polycristallins, et ce jusqu’aux très basses températures (40 mK). Cet équipement vient en complément du cryostat qui limitait jusqu’à présent les expériences à une température minimale de 1.5 K. Fabriqué par le concepteur de réfrigérateurs à dilution CryoConcept (famille Hexa Dry), cet équipement a été adapté pour G4.1 en collaboration avec les chercheurs et ingénieurs du LLB. Une enceinte étanche a ainsi été fabriquée, et des écrans, dotés de fenêtres en vanadium pour minimiser les diffusions parasites (notamment les pics de Bragg de l’aluminium), spécialement installés pour satisfaire les exigences expérimentales. Pour assurer une bonne thermalisation, les échantillons sont chargés dans des cellules conçues par le laboratoire de cryogénie du SPEC, qui permettent de maintenir une pression d’hélium de 15 à 40 bars. Aux températures de travail, cet hélium devenu superfluide assure la thermalisation des échantillons. Le dispositif permet d’atteindre des températures minimales de 38 mK, avec une régulation automatique et complètement autonome de la température jusqu’à 10 K.

De nombreuses expériences ont déjà été réalisées depuis la mise à disposition de cet environnement aux utilisateurs : sur des systèmes magnétiques complexes en particulier, comme les composés géométriquement frustrés à structure pyrochlore, les matériaux à base de terres rares « RKKY », ou les composés magnétiques unidimensionnels, tous caractérisés par des températures d’ordre magnétique, ou par des phénomènes d’ordre à courte distance, en dessous de 1 K. Plus d’une dizaine d’expériences en dilution est prévue dans les mois à venir, soulignant l’intérêt scientifique soutenu pour ce type d’environnement – échantillon.


A gauche : Diffractomètre G4.1 équipé du nouvel environnement échantillon. A droite, mesures de diffraction obtenues sur un matériau à base de terres rares, en dessous de 1 K.

Manipuler la lumière à petite échelle

Ludovic Douillard (SPEC/LEPO)

À l’échelle nanométrique, une particule métallique possède de remarquables propriétés optiques liées au phénomène de résonance plasmon de surface, une oscillation cohérente des électrons de conduction de l’objet. Ainsi, à la résonance plasmon, une particule métallique nanométrique piège la lumière à une échelle sub-longueur d’onde sous forme de points chauds du champ électromagnétique. L’objectif de ce travail est de manipuler ces points de fortes intensités au travers du choix de la géométrie de l’objet, de les allumer et éteindre à façon. La mise à disposition de tels spots miniatures de lumière offre un large éventail d’applications dans de nombreux domaines : technologies de l’information, énergies renouvelables, biomédecine…

L’ingénierie des points chauds s’appuie sur un outil de prédiction analytique simple dont l’objectif est de définir une carte de résonance de l’objet. Cet outil, issu de la théorie des groupes, tire parti des géométries de l’objet et de celle du champ incident au travers de sa polarisation. Le suivi expérimental des points chauds est conduit par microscopie de photoémission d’électrons PEEM (PhotoEmission Electron Microscopy), une technique de cartographie haute résolution non intrusive du champ proche optique. Nous avons testé cette approche sur un grand nombre d’objets d’intérêt plasmonique : bâtonnet, triangle, hexagone, disque, cube, sphère… La figure ci-contre rapporte un exemple de manipulation de points chauds sur une particule de symétrie hexagonale par action de la polarisation du faisceau optique. La « taille » du photon exprimée au travers de sa longueur d’onde est ici de 850 nm, la taille d’un point chaud est de seulement 10 nm.

Résonance plasmon dipolaire d’une nanoparticule d’or de symétrie hexagonale, pour différentes polarisations du champ incident. L'objet a une taille de 150 nm et la longueur d’onde d’excitation est de 850 nm. Colonne de gauche : imagerie champ proche par microscopie de photoémission d’électrons PEEM. Colonne de droite : états propres de charge obtenus par la théorie des groupes.