Disparition d’André Barraud

André Barraud, ancien chercheur dans notre département s’est éteint ce lundi 24 juin 2013. Avocat infatigable de l’électronique moléculaire dont il a porté le flambeau au CEA et dans le monde entier, son enthousiasme et sa curiosité scientifique ont inspiré nombre de chercheurs, qui souhaitent lui rendre hommage aujourd'hui.

Après des études supérieures de Physique à l’ENS Cachan, et une agrégation de Physique Appliquée, André Barraud a rejoint le CEA en 1958 au Département d’Etudes et Ingénierie Nucléaire (DEIN) dépendant de la DTA (actuellement DRT). Son 1er article scientifique porte sur « l'Influence des neutrons rapides sur la recombinaison des paires électrons-trous dans le germanium » (CRAC 249: 2181-2183. 1959). Le début de sa carrière est consacré à l’arséniure de gallium, mais il s’intéresse très vite aux isolants de grille ultraminces requis par la miniaturisation des transistors, et décide de tester les propriétés diélectriques des multicouches organiques.

C’est le début d’une longue et fructueuse carrière consacrée aux films de Langmuir-Blodgett et leurs applications. Des systèmes « passifs » comme les isolants ultraminces, il passe très vite à des matériaux actifs, comme des photorésists, puis, avec ces fidèles compagnons de travail Annie Ruaudel-Teixier et Michel Vandevyver, il mute vers le Service de Chimie Moléculaire (DESICP/DLPC, puis DSM/DRECAM) et entame la partie la plus fructueuse de sa carrière : détectant très vite le potentiel de contrôle à l’échelle supramoléculaire que recèle la technique de Langmuir-Blodgett, son équipe l’utilise pour étudier les transferts d’énergie entre chromophores, bâtir les 1ers films ultraminces conducteurs, puis plus tard la 1ère monocouche organique conductrice, le 1er polymère organique bidimensionnel, mesurer pour la 1ère fois une transition de spin en monocouche et construire des structures hybrides minéral-organique ultraminces par chimie d’insertion.

Très attentif à l’utilisation pratique de ses travaux, André Barraud a consacré beaucoup d’énergie à l’instrumentation, concevant, construisant et commercialisant notamment les automates de Langmuir-Blodgett utilisées dans ses deux équipes, et aux applications de ces films : capteurs de gaz, biocapteurs, détecteurs SAW et acousto-électriques… André Barraud est l’auteur d’environ 150 articles scientifiques, et près de 20 brevets. Par ses travaux démontrant que la matière pouvait être maîtrisée à l'échelle nanométrique, il a joué un rôle pionnier dans l'émergence des nanosciences en France dont il a contribué à constituer la communauté au début des années 1990.

Nos pensées vont à toute sa famille à qui nous adressons toute notre sympathie en ce moment douloureux. A l'IRAMIS, nous garderons le souvenir du scientifique qui savait passionner ses nombreux auditeurs et qui a su communiquer sa flamme à tous ceux qu'il a encadré.