Comportement semi-conducteur idéal d’un monocristal organique

Comportement semi-conducteur idéal d’un monocristal organique

D. Fichou1, E. Menard1 et A. Marchenko1, J. A. Rogers2, V. Podzorov3, M. E. Gershenson3

L’émergence des semi-conducteurs organiques dans le monde de l’électronique et des technologies de l’information est désormais une réalité. Petites molécules ou polymères, ces matériaux peuvent être substitués au silicium dans la fabrication de transistors, de cellules photovoltaïques ou de diodes électro-luminescentes. Faciles à déposer par des techniques douces, mécaniquement flexibles, ils sont peu coûteux. Leur structure peut être ajustée de manière à obtenir les propriétés désirées. Enfin, la possibilité récente d’obtenir des monocristaux de très grande pureté ouvre de vastes perspectives vers « l’Electronique Plastique ».

De par leurs applications potentielles, l’étude des propriétés de transport électronique de ces matériaux est primordiale. Les diodes et transistors à effet de champ organiques construits à la surface de monocristaux permettent d’obtenir ce type d’information. Afin d’accéder à l’interface critique située entre le cristal et le diélectrique des dispositifs à effets de champ, il est nécessaire d’utiliser des techniques locales non destructrices.

En collaboration avec les universités américaines d’Urbana-Champaign et Rutgers, nous avons étudié par microscopie et spectroscopie à effet tunnel (STM/STS) les propriétés intrinsèques de transport de monocristaux massiques de rubrène. Les excellentes propriétés électriques de ces cristaux (mobilité ~ 15-20 cm2/V.s à température ambiante) permettent d’imager leur surface par STM et de déterminer la position et l’orientation des molécules individuelles dans le plan cristallin a-b. Par ailleurs, les courbes STS enregistrées dans l’obscurité et sous éclairement révèlent un comportement redresseur quasi-idéal. En effet, ces courbes sont exemptes des courants surfaciques habituellement observés dans les semi-conducteurs inorganiques où sont présents de nombreux états de surface (liaisons pendantes, etc). Les courbes I-V obtenues par ailleurs sur des diodes à microcontact réalisées sur ces mêmes monocristaux de rubrène confirment le comportement redresseur quasi-idéal observé en STS. Ce comportement redresseur s’explique par la nature du cristal qui n’autorise qu’une conduction par les trous (type p).

Courbes I-V obtenues par STS sur un monocristal de rubrène (en bleu : échelle linéaire ; en rouge échelle semi-log). En insert : image STM du plan cristallin a-b du cristal.

Ces résultats, observés pour la première fois sur un monocristal de semi-conducteur organique, ouvrent de nouvelles perspectives dans le cadre de la physique des cristaux organiques et de l’électronique moléculaire.

Référence :

[1] Nanoscale surface morphology and rectifying behavior of a bulk single-crystal organic semiconductor,
E. Menard, A. Marchenko, V. Podzorov, M. E. Gershenson, D. Fichou and J. A. Rogers,
Advanced Materials, 18(12) (2006) 1552.

1DRECAM/ Service de Physique et Chimie des Surfaces et Interfaces, (SPCSI) CEA- Saclay
2Departments of Materials Science and Engineering, University of Illinois at Urbana/Champaign, Urbana, IL 61801, USA
3Experimental Condensed Matter Physics Group, Department of Physics and Astronomy, Rutgers University, Piscataway, NJ 08854, USA