RMN – Résonance Magnétique Nucléaire / IRM – Imagerie par Résonance Magnétique
P. Berthault (NIMBE/LSDRM), C. Fermon (SPEC/LNO), H. Desvaux, L. Barbier
(actualisé en Octobre 2015, septembre 2020, janvier 2025)
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La RMN consiste à détecter les variations de l’aimantation des noyaux des atomes sous l’action d’un champ magnétique puissant et d’une onde électromagnétique (onde radio) excitatrice.
La Résonance Magnétique Nucléaire, découverte il y a maintenant 60 ans et présente sur le Centre de Saclay depuis près de 50 ans, est maintenant utilisée dans de très nombreux domaines allant de la physique de la matière condensée à la médecine en passant par l’analyse chimique, la biologie structurale,… Les progrès ont été médiatisés à travers trois prix Nobel (R.R. Ernst en Chimie en 1991, K. Wüthrich en Chimie en 2002, P. Lauterbur et sir P. Mansfield en médecine en 2003).
La RMN : aujourd’hui et demain à l’IRAMIS
P. Berthault (NIMBE/LSDRM), H. Desvaux,
La RMN est devenue une méthode alternative à la diffraction des rayons X pour l’étude des protéines et une méthode de choix dans l’étude des matériaux désordonnés comme les verres, les polymères ou les bétons. Dans ce cadre, les activités de l’IRAMIS ont porté sur le développement de nouvelles méthodes :
- appropriées à l’étude structurale des constituants des verres nucléaires, (étude d’isotopes quadrupolaires et combinaison des mesures avec des résultats de simulations numériques, collaboration DSM/DEN).
- d’étude de la structure et de la dynamique de bio-molécules en solution (collaboration DSM/DSV) : caractérisation des mouvements moléculaires de temps caractéristiques autour de la microseconde ou l’étude de petites molécules organiques dans des milieux anisotropes obtenus à partir de cristaux liquides minéraux.
Aujourd’hui, si une partie de ces thématiques perdure, la tendance récente est au développement de recherches visant à combattre la faiblesse majeure de la RMN : sa faible sensibilité.
Pour augmenter le signal RMN, la solution usuelle consiste, comme dans le cas du projet Iseult à NeuroSpin à utiliser des champs magnétiques les plus intenses possibles. Cependant, dans le futur, cette solution sera nécessairement limitée par les contraintes sur les matériaux supraconducteurs. Aussi d’autres approches permettant d’augmenter l’intensité du signal par unité de temps et/ou la résolution spatiale sont développées.
Pour gagner en sensibilité, l’utilisation d’espèces ‘hyperpolarisées’ devrait prendre un grand essor. Cette technique permet d’obtenir des écarts de populations entre les niveaux d’énergie « spin up / spin down » largement augmentés, et qui s’écartent fortement de leur valeur à l’équilibre dans le champ magnétique utilisé, Deux techniques développées à l’IRAMIS permettent ainsi de ‘booster’ la polarisation nucléaire :
- La polarisation nucléaire dynamique, initiée au SPEC, met à profit un transfert de polarisation électron-noyau pour obtenir des gains en signal de plusieurs milliers. Cette approche s’est appliqué dès 2006 à l’IRM.
- Le pompage optique de gaz rares, où la polarisation photonique est transférée vers les spins nucléaires. Depuis 1998, le NIMBE/LSDRM (ex SCM) développe une telle expérience, et produit du xénon polarisé par laser utilisé en spectroscopie. Le gain en polarisation par rapport à la polarisation thermique même dans les supraconducteurs actuels est de plus de 4 ordres de grandeur ! Le NIMBE s’est fait une spécialité de transférer cette forte polarisation du gaz rare utilisé, le xénon, vers d’autres noyaux magnétiquement actifs en RMN, développant ainsi une sonde des milieux hydrophobes et explorant les capacités de gain en sensibilité.
En parallèle, il est aussi important d’augmenter les performances des capteurs ou de développer des méthodes alternatives de détection. L’IRAMIS développe plusieurs programmes de recherches dans cet axe :
- La microscopie de résonance magnétique, où un micro-levier identique à ceux utilisés dans un microscope à force atomique est utilisé pour faire de l’imagerie magnétique de surface avec une résolution spatiale sub-micronique (SPEC).
- Les capteurs magnétiques utilisant des résistances magnétiques géantes du SPEC permettent d’atteindre des sensibilités de détection des fluctuations de champ magnétique de l’ordre de 10-15T/Hz1/2. Des recherches dans ce sens se poursuivent au laboratoire NeuroSpin pour la magnéto-encéphalographie et leur développement pour des applications en RMN a aussi été entrepris.
- Les micro-bobines radiofréquence. Les systèmes miniaturisés développés au NIMBE (ex SCM) permettent de réduire la quantité de porteurs de spins nécessaire à l’étude par RMN tout en conservant une très bonne résolution spectrale.
- De la même façon que le transfert photons-spin nucléaires permet de multiplier la polarisation nucléaire, la détection optique de la résonance magnétique, pour laquelle des travaux ont débutés à l’IRAMIS, offrira un gain précieux en sensibilité. Celle-ci pourra en outre offrir une excellente résolution spatiale.
De plus, l’utilisation de champs magnétiques intenses n’induit pas seulement un gain en sensibilité, mais aussi permet un accroissement de la résolution spectrale. Des travaux pour développer une biosonde à base de xénon polarisé par laser sont entrepris à l’IRAMIS. Par son caractère hydrophobe, le xénon a une grande affinité pour des molécules-cages qui sont modifiées chimiquement pour cibler certains récepteurs cellulaires. Le déplacement chimique du xénon encapsulé est très différent de celui du xénon libre, ce qui permet de réaliser une imagerie sensible et sélective d’environnements biologiques spécifiques. Dans le cadre d’une collaboration a débuté avec NeuroSpin, ces traceurs sont testés sur des souris géniques.
Enfin, constatant que la résonance magnétique nucléaire classique est constituée d’un appareillage assez lourd et encombrant qui nécessite le déplacement des objets d’étude vers les systèmes RMN / IRM, des recherches sont en cours pour développer un spectromètre portable utilisant des aimants permanents ou à bobine bas champ. Plusieurs champs d’application pourraient profiter de ces travaux, parmi lesquels :
- l’analyse in situ de matériaux hétérogènes (roches, peintures, etc…
- le déplacement de spectromètres en zone chaude
- l’imagerie médicale localisée et transportable
Nul doute que la présence à Saclay de la plateforme IRM à vocation internationale NeuroSpin permettra de nouvelles synergies avec les laboratoires de l’IRAMIS travaillant à la pointe des recherches en RMN depuis plusieurs décennies !
Le Laboratoire Structure et Dynamique par Résonance Magnétique – LSDRM
Le Laboratoire Structure et Dynamique par Résonance Magnétique – LSDRM
NB : dans les années 2000, le « Laboratoire CEA-CNRS C. Fréjacques », commun à la Direction des Sciences de la Matière (DSM) et la Direction des Sciences du Vivant (DSV), a rassemblé les équipes de recherche en RMN du CEA.
IRAMIS/NIMBE (ex SCM) et SPEC
Les recherches menées au « Laboratoire de Structure et Dynamique par Résonance Magnétique » sont centrées sur le développement et l’utilisation de l’outil RMN. De nouvelles méthodes et des approches originales sont développées pour des applications allant de la phase gaz à la phase solide, pour une meilleure connaissance de la structure fine des matériaux tels que verres nucléaires ou macromolécules biologiques. Les compétences du Laboratoire s’étendent des développements instrumentaux jusqu’aux simulations moléculaires.
Compétences spécifiques, principaux thèmes de recherche en RMN à l’IRAMIS
- instrumentation en Résonance Magnétique Nucléaire;
- Développements méthodologiques de RMN en phase liquide et modélisation: en particulier caractérisation de la dynamique interne des bio-molécules pour les mouvements de l’ordre de la nanoseconde et dans le domaine allant de la micro à la milliseconde;
- Pompage optique par échange de spin du xénon et utilisation de ce xénon polarisé en RMN liquide;
- RMN du solide et développements méthodologiques, simulation et traitement du signal, aspect physique de la RMN du solide (thermodynamique de spins);
- RMN du solide et développements méthodologiques, simulation et traitement du signal, aspect physique de la RMN du solide (thermodynamique de spins);
- Amélioration de la résolution structurale de biomolécules par l’utilisation de cristaux liquides et de micelles inverses.
- Application de la RMN du solide à l’étude structurale des verres et des silicates de calcium hydratés.
Équipements remarquables, méthodes ou techniques spécifiques en RMN à l’IRAMIS
- 2002 – Spectromètres RMN liquide et solide à haute résolution;
- 2002 – Montage permettant la préparation de tubes RMN sous pression;
- 2002 – Montage de pompage optique permettant de polariser par laser du xénon (lasers, pompes, spectromètre RMN CW,…);
- 2016 – Développement d’un dispositif de production de Xe polarisé transportable (Noble gas spin-exchange optical pumping – SEOP in a van – 2016)
- 2018 – Acquisition / installation d’un spectromètre/imageur RMN avec un aimant à grande cavité « Super wide bore ».
Quelques faits marquants en RMN à l’IRAMIS
- 1998 –Utilisation de gaz hyperpolarisés en RMN
- 2002 – Première caractérisation de cavité hydrophobe de protéine à pression ambiante par transfert d’aimantation sélectif à partir de xénon polarisé par laser
- 2002 – Première utilisation de cristaux liquides minéraux dilués pour induire une orientation partielle de bio-molécules destinée à apporter de nouvelles informations structurales non locales.
- Mise en évidence de phénomènes de température de spin (ordre dipolaire) en présence de rotation de l’échantillon à l’angle magique, application au développement de nouvelles techniques de polarisation croisée.
- Calcul ab-initio de paramètres RMN sur des structures vitreuses obtenues par dynamique moléculaire.
- 2003 – 2025 – Développement de capteurs magnétiques hypersensibles (femtoT), et applications à l’IRM bas champ – Claude Fermon – Myriam Pannetier-Lecoeur (IRAMIS/SPEC)
- 2008 – Émissions chaotiques déclenchées par le bruit dans un maser RMN
- 2009 – Vers des seuils de sensibilité record pour la RMN, par la mesure de ‘bruit de spins hyperpolarisés’
- 2010 – Record de distance pour la RMN du solide !
- 2012 – Les micro-détecteurs tournants permettent l’’analyse RMN de micro-biopsies
- 2013 – Développement d’une architecture générique pour la construction de sondes moléculaires exploitant l’IRM du xénon 129
- 2014 – Nouvelle instrumentation RMN pour l’analyse de mouvements moléculaires lents à haute résolution.
- 2014 – Développement de l’IRM bas champ à l’IRAMIS/SPEC/LNO
- 2014 – Xe polarisé en cage : une sonde RMN sensible et sélective de son environnement
- 2015 – Comment le verre se défend des agressions de l’eau
- 2016 – Spectroscopie RMN de bruit de spin : un modèle analytique complet pour une sensibilité inégalée
- 2017 – Une micro-sonde RMN métabolique in vivo
- 2017 – Théorie de la structure électronique pour décrypter la liaison chimique dans les systèmes d’actinides
- 2018 – Suivre en direct une synthèse chimique grâce à la RMN
- 2019 – Sonde bimodale fluorescence –RMN pour la détection spécifique des protéines
- 2020 – Une molécule-cage transporteuse d’oxygène
- 2021 – Surveillance en direct de la chimie d’une batterie Li-O2 par RMN operando
- 2023 – Étude operando par RMN d’une mini-batterie à flux redox organique
- Février 2024 – Imagerie RMN operando de cellules « pouch » Li-Ion
- Avril 2024 – Premières images IRM de cerveau humain avec l’aimant Iseult 11.7 T (Conception CEA-IRFU – CEA-Institut Joliot/Neurospin) – Dossier CEA projet Iseult (2021)
- 2025 – Fourniture par l’IRAMIS/SPEC de deux prototypes de RMN bas champ : un au laboratoire SHFJ (Service Hospitalier Frédéric Joliot à Orsay) du CEA et un autre à l’hôpital Robert Debré (suivi des prématurés).
Quelques liens WEB sur la RMN à l’IRAMIS
- Laboratoire Structure et Dynamique par Résonance Magnétique de l’IRAMIS-NIMBE (ex SCM)
- Le groupe CAPMAG de l’IRAMIS
- The International Society of Magnetic resonance
- Le groupement « Ampère » : association européenne de scientifiques actifs dans les domaines de la résonance magnétique, optique, diélectriques, imagerie par résonance magnétique.
- Maurice Goldman : « Histoire de la RMN, Autour de ses premiers acteurs … et après ».
- Maurice Goldman, académicien
- Séminaire Hervé Desvaux (2005) : « Une petite histoire de la Résonance Magnétique Nucléaire – De la physique fondamentale à un outil de biologie«
- 2007 Cours de Hervé Desvaux et Patrick Berthault : « Principes de la Résonance Magnétique Nucléaire«
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Spectromètre RMN 11,7 T équipé pour la RMN du liquide et la micro-imagerie.
Équipe du LSDRM devant le spectromètre RMN 14 T (2004).
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Installation de pompage optique de gaz rares au LSDRM
Développements instrumentaux autour d’un spectromètre RMN : système de polarisation de xénon utilisant le champ de fuite de l’aimant supraconducteur.
Quelques dates autour de la RMN
à l’IRAMIS (anct DRECAM) et au CEA
1947 | Anatole Abragam entre au CEA |
1950-60 | Travaux d’Abragam et de son équipe sur la RMN. Développement du concept de température de spin. |
1955 | Maurice Goldman entre au CEA – Service de Physique du Solide et de Résonance Magnétique Nucléaire |
1960 | Anatole Abragam nommé Professeur au Collège de France, chaire de magnétisme nucléaire |
1969 | Anatole Abragam et Maurice Goldman s’orientent vers l’étude de l’ordre magnétique nucléaire à très basse température (~nK). Mise en évidence de l’antiferromagnétisme nucléaire |
1969 | Maurice Goldman reprend la chaire de magnétisme nucléaire du Collège de France. Sous-directeur de laboratoire au Collège de France, il y poursuit ses études sur la RMN. |
1973 | Ouverture du Laboratoire commun DSM-DSV (C. Fréjacques – J. Coursaget – J.Horowitz) |
1982 | Publication du livre « Magnétisme nucléaire, ordre et désordre » par Anatole Abragam et Maurice Goldman. |
1984 | Retour de Maurice Goldman au CEA, pour le développement de la résonance magnétique nucléaire (RMN) biomédicale. |
1993 | Maurice Goldman, conseiller scientifique au CEA. |
1981 | Au DRECAM, le SCM et le SPEC joignent leurs efforts en RMN du solide. Les chimistes s’équipent en RMN : arrivée du 1er spectromètre supraconducteur à 11,7T en Europe (Bruker, 500 MHz 1H) |
1986 | J. Virlet et A. Llor inventent la méthode de haute résolution pour les noyaux quadrupolaires en solide appelée DAS (en même temps qu’A. Pines à Berkeley), et la RMN à champ nul. |
1988 | Arrivée au DRECAM du spectromètre 14 T (Bruker, 600MHz 1H) |
2000 | Collaboration autour du spectromètre (18,7 T, 800 MHz 1H) de l’ICSN (Institut de Chimie des Substances Naturelles, Gif) |
2004 | Maurice Goldman est élu membre de l’Académie des Sciences Les contributions de Maurice Goldman en RMN ont porté essentiellement sur la thermodynamique statistique des systèmes de spins, l’ordre magnétique nucléaire, la relaxation et la polarisation dynamique nucléaires, et la théorie de la RMN de haute résolution dans les liquides. |
2004 | Formation RMN à l’INSTN donnée par le Laboratoire Structure et Dynamique par Résonance Magnétique. |
2005 | Patrick Berthault est nommé responsable du « Laboratoire Structure et Dynamique par Résonance Magnétique » au CEA/DRECAM (devenu IRAMIS). |
2006 | Claude Fermon, élève d’Abragam, Hervé Desvaux, doctorant de Maurice Goldman, et leurs collègues poursuivent leurs développements méthodologiques en RMN. |
2006 | Inauguration de NeuroSpin à Saclay. |
2007 | Un contrat « Starting grant » de l’European Research Council (ERC) est attribué à Dimitrios Sakellariou de l’équipe RMN du SCM. |
2008 | Le DRECAM devient l’IRAMIS. |
2015 |
Conférence à l’Académie des sciences sur la RMN – Prolongements récents de l’oeuvre d’Anatole Abragam Introduction de Maurice Golodman et Daniel Estève |
Bref historique de la RMN
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La découverte de la résonance magnétique nucléaire date de 1946 quand E.M. Purcell montre la présence d’une absorption résonante dans les solides et F. Bloch montre de son côté l’existence d’une induction nucléaire. Ces travaux leur ont valu le prix Nobel en 1952.
- Resonance absorption by nuclear magnetic moments in a solid E. M. Purcell, H. C. Torrey, and R. V. Pound, Phys. Rev. 69 (1946) 37)
- Nuclear induction, F. Bloch Phys. Rev. 70 (1946) 460
Le CEA s’est impliqué très rapidement dans cette thématique, sous la direction d’Anatole Abragam dont les contributions principales sont : méthode de l’Hamiltonien de spin (avec Maurice Pryce, 1949), théorie de la structure hyperfine dans l’état solide ; explication de la structure hyperfine anormale (1950). La découverte de la polarisation dynamique dans les liquides se traduit par l’invention d’un magnétomètre pour champ terrestre basé sur ce principe (1958) ainsi que les études de base sur la température de spin et la démonstration de son identité avec la température thermodynamique (1957, 1958). En 1960, A. Abragam est nommé professeur au collège de France pour la chaire de magnétisme Nucléaire. Il publie en 1961 un livre sur le magnétisme nucléaire qui est encore aujourd’hui une référence incontestée dans ce domaine.
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Dans les années 1970, A. Abragam et M. Goldman se penchent sur un problème modèle de la physique de l’état condensé, l’ordre magnétique nucléaire, et publient le livre Magnétisme nucléaire, ordre et désordre en 1982.
Avec les progrès de l’informatique et des champs magnétiques, la RMN est passée de la physique de la matière condensée, à l’analyse chimique puis à la biologie structurale et plus récemment à l’imagerie médicale.
En 1961 est commercialisé le spectromètre A60 par la firme Varian, qui a connu une grande vogue et a commencé à transformer la RMN en outil de chimie analytique important. En 1964 est fabriqué le premier spectromètre (Varian) à aimant supraconducteur à 200 MHz, bientôt poussé à 220 MHz. En 1964, une expérience importante au développement immédiat, la première utilisation de la transformée de Fourier en RMN liquide par Anderson et R.R. Ernst. En 1972 est produit le premier spectromètre (Bruker) entièrement dédié aux impulsions et à la transformée de Fourier.
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Deux développements importants prennent place en chimie à partir de 1968. D’une part, le laboratoire de R.R. Ernst à Zurich développe la méthodologie des transformées de Fourier pour les molécules en solution. D’autre part, le laboratoire de J. Waugh au Massachusetts Institute of Technology (MIT) invente et développe la haute résolution dans les solides au moyen de séquences d’impulsions. Ces méthodes, de maniement délicat, seront supplantées en pratique par l’invention de la méthode d’observation directe de noyaux rares et peu sensibles, essentiellement 13C dans les composés organiques. R. Andrew propose l’utilisation de la rotation à l’angle magique (MAS).
Le début des années 70 connaît deux innovations fondamentales. En 1971, J. Jeener présente modestement, à une École d’été, l’idée et la première réalisation de la spectroscopie à deux dimensions dans les liquides, par la méthode de la double transformée de Fourier. Cette découverte est restée confidentielle jusqu’à la sortie en 1974 du célèbre article de Aue, Bartholdi et R.R. Ernst, qui décrit toute une panoplie de concepts et méthodes pour cette spectroscopie à deux dimensions avec quelques illustrations expérimentales de validation et fonde réellement cette discipline de toute première importance.
Dans un registre différent, P. Lauterbur et P. Mansfield (Prix Nobel 2003) découvrent indépendamment l’idée de l’imagerie RMN qui mûrira très vite par des expériences « >in vivo » sur petits animaux et suscitera un vif intérêt auprès des milieux médicaux, tandis que le laboratoire de Richards à Oxford développe la spectroscopie « in vivo », essentiellement celle du phosphore 31 dans les muscles.
Au CEA, un pôle de spectromètres destinés aux applications du solide, de la chimie et de la biologie s’est progressivement créé et s’est abrité au sein du Service de Chimie Moléculaire (IRAMIS/SCM). Les physiciens du Service de Physique de l’Etat Condensé (IRAMIS/SPEC), continuent eux aussi à s’investir dans la méthodologie RMN (voir la partie « La RMN à l’IRAMIS »). A signaler, la publication récente d’un livre destiné aux biologistes et aux chimistes publiés par Maurice Goldman sur la RMN haute résolution.
L’année 2006, voit l’inauguration du Centre NeuroSpin, adjacent au centre du CEA- Saclay, dédié à l’imagerie Fonctionnelle par IRM.
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Examen d’IRM (source : Cité des sciences)
Lors d’un examen d’IRM, le patient est soumis à un champ magnétique intense (30 000 plus puissant que celui de la Terre). L’eau présente dans son corps réagit par un signal nommé « Résonance magnétique ».
Quelques dates clés autour de la RMN
1924 | W. Pauli émet l’hypothèse du spin du proton | |
1936 | Observation des moments magnétiques nucléaires par I.I. Rabi | |
1938 | I.I. Rabi observe le phénomène de RMN, mais le considère comme un artefact. | |
1946 | E.M. Purcell et F. Bloch écouvrent la RMN | |
1947 | Anatole Abragam entre au CEA | |
1949 | Observation des échos de spin par Hahn : Spin Echoes, E. L. Hahn Phys. Rev. 80 (1950) 580 . | |
1950 | Observation du déplacement chimique de la résonance par W. G. Proctor and F. C. Yu, et Dickinson : On the Magnetic Moments of Mn55, Co59, Cl37, N15, and N14, W. G. Proctor and F. C. Yu Phys. Rev. 77(1950), 716Dependence of the F19 Nuclear resonance position on chemical compound, W. C. Dickinson Phys. Rev. 77 (1950) 736 |
|
1952 | Prix Nobel : E. Purcell et F. Bloch | |
1953-55 | Premier spectromètre commercial Varian | |
1957 | Introduction du concept de « température de spin » (dans le référentiel du laboratoire) par Anatole Abragam | |
1960 | A. Abragam nommé Professeur au Collège de France, chaire de magnétisme Nucléaire | |
1961 | Commercialisation du spectromètre A60 par la firme Varian | |
1964 | Premier spectromètre (Varian) à aimant supraconducteur | |
1964 | Anderson et R.R. Ernst, première utilisation de la transformée de Fourier (dans un liquide) | |
1968 | Méthodologie des transformées de Fourier pour les molécules en solution, par R.R. Ernst à Zurich. | |
1968 | Haute résolution dans les solides au moyen de séquences d’impulsions, Laboratoire de J. Waugh (MIT) | |
1970 | A. Abragam et M. Goldman : Etude de l’ordre magnétique nucléaire | |
1971 | Spectroscopie à deux dimensions dans les liquides, par la méthode de la double transformée de Fourier, par J. Jeener | |
1972 | Premier spectromètre à impulsions et analyse par transformée de Fourier, (Bruker) | |
1972 | Technique de polarisation croisée par A. Pines and J. Waugh : Observation directe du spin des noyaux rares, (essentiellement 13C dans les composés organiques, après polarisation croisée avec 1H) | |
1980 | Introduction dans le domaine médical de l’imagerie par résonance magnétique (IRM) | |
1991 | Prix Nobel de chimie à R.R. Ernst | ![]() |
2002 | Prix Nobel de chimie à K. Wüthrich (application en biologie) | |
2003 | Prix Nobel de médecine à P.C. Lauterbur et P. Mansfield, pour leurs travaux sur l’imagerie RMN |
Quelques chiffres (2006)
- Une unité IRM coûte entre 1,5 et 3 M€.
- 40 000 machines IRM dans le monde
- 70 millions d’examens par an
Quelques liens WEBs
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- Maurice Goldman : Histoire de la RMN, Autour de ses premiers acteurs … et après, Actualité Chimique, Mars 2004).
(voir aussi le site CultureSciences-Chimie). - Laboratoire Structure et Dynamique par Résonance Magnétique de l’IRAMIS
- Maurice Goldman, académicien
- Notions de RMN : http://jerome.giraudet.free.fr/recherchermn.htm
- Tout sur l’IRM pas à pas
Biographie d’Anatole Abragam
- Né en Russie le 15 décembre 1914.
- Études secondaires au Lycée Janson de Sailly.
- Bachelier de Mathématiques en 1932
- Licencié ès Sciences (Sorbonne) en 1936
- Préparation d’une thèse (inachevée) sous la direction de Francis Perrin (1937-1939)
- 1939-1940 : mobilisé dans l’Armée
- 1940-1944 : Professeur libre dans l’enseignement privé
- 1944-1945 : FFI puis engagé volontaire dans l’Armée
- 1945-1947 : École Supérieure d’Électricité (diplômé en 1947)
- Carrière au Commissariat à l’Énergie Atomique (du 01.01.1947 au 01.01.1980)
- Physicien (1947-1954)
- Chef de groupe (1954-1956)
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De gauche à droite : A. Abragam, J.R. Oppenheimer, L. Stasi, M. Sandoval Vallarta, V.F. Weisskopf and V.G. Soloviev, Scientific Council Meeting, Trieste, Septembre 1964
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- Chef de Service (1956-1959)
- Chef de Département (1959-1965)
- Directeur de la Physique (1965-1970)
- Directeur de Recherches (1970-1980)
- Collège de France, Professeur titulaire de la Chaire de Magnétisme Nucléaire depuis avril 1960
- Professeur honoraire depuis octobre 1985
Sociétés Savantes
- Président de la Société Française de Physique (1967)
- Vice-Président de I.U.P.A.P. (1977-1980)
- Membre de l’Académie des Sciences depuis 1973
- Membre étranger de :
- l’Académie Américaine des Arts et Sciences depuis 1974,
- de l’Académie Nationale des États-Unis depuis 1977
- de la Société Royale de Londres depuis 1983
- Grande Médaille d’Or Lomonossov de l’Académie des Sciences de Russie (8 juillet 1996)
- Décès d’Anatole Abragam, le 8 juin 2011 à Vitry-sur-Seine
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Anatole Abragam
à Neurospin (2007)
© Luc Barbier, CEA-IRAMIS
Principaux travaux et découvertes
- La méthode de l’Hamiltonien de spin (avec Maurice Pryce, 1949)
- Théorie de la structure hyperfine dans l’état solide ; explication de la structure hyperfine anormale (1950)
- Théorie de la perturbation de corrélations angulaires dans l’état condensé, par les champs électriques et magnétiques, statiques ou variables (1952)
- Découverte de la polarisation dynamique dans les liquides, invention d’un magnétomètre pour champ terrestre basé sur ce principe (1958)
- Études fondamentales sur la température de spin, démonstration de son identité avec la température thermodynamique (1957, 1958)
- Découverte de la polarisation dynamique dans les solides et applications à la construction de cibles polarisées (1958 et années suivantes)
- Découverte (production et observation) de l’antiferromagnétisme, puis du ferromagnétisme nucléaire (1970 et années suivantes)
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- Première observation par diffusion de neutrons de surstructures de Bragg dans les antiferromagnétiques nucléaires (1978 et années suivantes)
- Découverte de la précession neutronique, dite pseudomagnétique, dans les cibles nucléaires polarisées et application systématique à la mesure d’amplitudes de diffusion neutroniques dépendant du spin (1973 et années suivantes)
- Nouvelle méthode de spectroscopie muonique (1984)
Livres
- The Principles of Nuclear Magnetism, OUP, 1961
- Electron Paramagnetic Resonance of Transition ions, avec B. Bleaney, OUP, 1970
- Nuclear Magnetism, Order and Disorder, avec Maurice Goldman, OUP, 1982
- Réflexions d’un physicien, Hermann, 1983
- L’effet Mössbauer, Gordon and Breach, 1964
- De la Physique avant toute chose, Odile Jacob, 1987
- Time Reversal – an autobiography, OUP, 1989
- Physicien, où as-tu été ?, Naouka (Russie), 1991
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