La protection et la conservation des objets du patrimoine culturel (archéologiques, musée, monuments, statuaire, …) est un enjeu sociétal majeur. Ceux-ci subissent des altérations dues aux interactions avec l’environnement. C’est tout particulièrement le cas des métaux (fer – acier, cuivres – bronzes, plomb, etc) qui se corrodent. Cette altération peut avoir lieu dès leur abandon mais également lors de leur exposition au public. La mise en place de traitements efficaces de restauration et de protection est alors cruciale. Or, ceux-ci ne peuvent être de simples transpositions de solutions utilisées dans l’industrie des traitements anticorrosion. En effet, il existe pour le patrimoine des exigences spécifiques de préservation de l’aspect des objets lors du traitement et de réversibilité des revêtements appliqués. De plus ces systèmes de long terme ont des spécificités physico-chimiques (hétérogénéité, réactivité,…). Ainsi, tant les traitements de restauration, que les revêtements de protection, doivent faire l’objet de recherches adaptées mettant en jeu des techniques de caractérisation multi-échelle et des tests représentatifs des conditions d’utilisation.
La société A-CORROS est spécialisée dans la mise en œuvre et le développement de ces traitements. Elle a mis au point un prototype unique en Europe, de déchloruration, étape essentielle de traitement des métaux archéologiques, par voie subcritique. Une fois opérationnel, ce protocole réduira de plusieurs ordres de grandeur les temps de traitements, avec des conséquences économiques majeures pour la restauration des objets archéologiques métalliques. Avant de passer à une phase d’exploitation commerciale, ce nouveau procédé nécessite cependant des recherches approfondies sur l’évolution de la structure et de la texture des produits de corrosion au cours du traitement afin d’en assurer la reproductibilité et la fiabilité.
Par ailleurs, A-CORROS, comme l’ensemble des acteurs du patrimoine, utilise un certain nombre de revêtements de protection qu’elle met en œuvre sur les objets de grandes dimensions exposés, notamment en plein air. Ces traitements, actuellement basés sur l’utilisation de cires microcristallines ou d’inhibiteurs de corrosion sont d’une efficacité limitée dans le temps. Ainsi, une action de R&D afin de comprendre les mécanismes d’action de ces composés et d’optimiser leur fonction de neutralisation des zones réactives au sein des produits de corrosion poreux tout en répondant aux critères du patrimoine serait cruciale en ce domaine.
Le Laboratoire Archéomatériaux et Prévision de l’Altération du NIMBE développe depuis quinze ans des recherches fondamentales sur la corrosion à long terme des métaux. Ses recherches portent entre autres sur les objets archéologiques et les traitements à mettre en œuvre. Elles sont basées sur des techniques de caractérisation fine du nano au micromètre (Raman, µXRD, FESEM, TEM, XAS, STXM sous synchrotron) et sur la remise en corrosion de systèmes anciens en milieu marqué isotopique dans des montages expérimentaux originaux, afin de cerner les processus mis en jeu. Le NIMBE maitrise également les procédés de synthèse de revêtements de surface et les approches nanométriques pour les matériaux.
Le projet ANR Labcom LETRIP (Laboratoire d’Etude des Traitements et Revêtements Innovants pour le Patrimoine) a pour but d’associer les prototypes expérimentaux et les compétences d’A-CORROS en conservation/restauration avec celles en recherche fondamentale du LAPA afin de produire de la R&D sur les deux axes évoqués plus haut. Leur complémentarité déjà éprouvée autour d’un projet de thèse permettra d’optimiser rapidement le traitement subcritique des métaux ferreux qui pourra être ainsi commercialisé dans le cadre de prestations adaptées aux besoins spécifiques des objets considérés. Cet accroissement d’activité permettra alors d’aborder des recherches à plus longue échéance (subcritique sur autres métaux et nouveaux traitements de protection).