Des surfaces auto-adhésives pour la nanoélectronique (graphène), la chimie ou la biologie

Des surfaces auto-adhésives pour la nanoélectronique (graphène), la chimie ou la biologie

Contact : P. Viel

L’étude de molécules complexes ou de matériaux biologiques individuels nécessite de savoir immobiliser ces objets sans altérer leurs fonctions actives. A l’image des bandes de papier tue-mouches ou plus précisément comme un scotch double face d’épaisseur moléculaire, le LCSI a développé des surfaces possédant des propriétés auto-adhésives capables de « coller » un grand nombre de matériaux organiques, minéraux et même biologiques. La fonctionnalisation de la surface du substrat est obtenue par le greffage pérenne de monocouches moléculaires robustes.

[1].

Dans la stratégie d’immobilisation d’un objet sur une surface il est souvent fait recours à une préfonctionnalisation de l’objet mobile et parfois aussi de la surface pour les rendre adhésif l’un vers l’autre. Les sels de diazonium sont de plus en plus utilisés dans cette approche du fait de leur grande réactivité vers de nombreuses fonctions chimiques et ils permettent de préparer par exemple des nanotubes de carbones ou des molécules biologiques pour leur immobilisation sur des surfaces.

Toujours basée sur l’utilisation de sels de diazonium, nous inversons cependant cette stratégie en ne modifiant que la surface. Il s’agit en fait d’ensemencer cette dernière par des sels de diazoniums substitués qui fixeront une couche minces organiques qui, lorsque le substituant est bien choisit, permet de créer de nouveaux sels de diazonium qui pointeront alors leurs extrémités réactives en direction de l’espace libre. La surface est alors prête à fixer les divers objets moléculaires qui lui seront présentés.

Le greffage de la couche de précurseurs et son activation finale avant utilisation sont basés sur des stratégies chimiques inspirées du procédé Graftfast [2]. La molécule sélectionnée pour réaliser cette double création de sel de diazonium est simplement la 1-4 benzènediamine dont chaque groupe amine successivement modifié. Il s’agit d’une chimie douce et verte ne mettant en œuvre que des solutions aqueuses acides. Cette démarche vient d’être testée avec succès sur différentes surfaces quelles soient métalliques ou organiques.

A gauche : image topographique en microscopie AFM du bord d’un feuillet de graphène (zone floutée) sur une surface (surface nue : zone rugueuse nette). A droite : mesure de résistivité locale par AFM-STM.

Deux premières applications ont été explorées à partir de ces surfaces auto-adhésives : la première vise la nanoconnectique en permettant l’immobilisation chimique de feuillets graphènes sur des surfaces. On observe à cette occasion que les mesures de résistance de contact par microscopie à sonde locale montrent un fort contraste de résistance électrique (fig.1). L’immobilisation de graphène sur des couches organiques minces permet d’ores et déjà d’envisager d’autres applications originales dans le domaine de l’électronique moléculaire en l’utilisant pour contacter des couches monomoléculaires d’architecture adaptée [3]..

La seconde application recherchée est d’immobiliser des matériaux biologiques tels que protéines, ADN ou enzymes. Elle permet déjà, en collaboration avec un industriel du domaine, la conception d’une nouvelle génération de biopuces [4]. Une preuve de concept a été faite par l’immobilisation de la Glucose Oxydase (GOD) avec le maintien de son activité biologique (voir figure). On retrouve dans cette application potentielle le bénéfice très important de l’absence de la préparation chimique, longue, complexe et coûteuse, des matériaux biologiques, et qui le plus souvent altère la réactivité des centres actifs.

Immobilisation d’une protéine sur une surface prête à coller. En insert la réponse biologique de la protéine immobilisée et active.

Contact : P. Viel


Références :

[1] « Covalent grafting onto self-adhesive surfaces based on aryldiazonium salt seed layers »
P. Viel, X. T. Le, V. Huc, J. Bar, A. Benedetto, A. Le Goff, D. Alamarguy, S. Noël, L. Baraton, S. Palacin
J. Mater. Chem. 18 (2008) 5913.

[2] Le procédé Graftfast© est développé et exploité par la start-up Pegas-Tech issue du SPCSI/LCSI.

[3] « Conductive-Probe Atomic Force Microscopy Characterisation of Graphene Sheets bonded onto Gold Surfaces »
F. Hauquier, D. Alamarguy, P. Viel, S. Noël, A. Filoramo, V. Huc, F. Houzé, S. Palacin, Appl. Surf. Sci. In press.

[4] « Universal toolset » for biochip synthesis: Towards a single-step chemistry for DNA or protein immobilization »
T. Berthelot, A. Garcia, X. T. Le, J. El Morsli, P. Jégou, S. Palacin, P. Viel, Langmuir, soumis, 2010.