Generating ultra-short single pulses: the attosecond lighthouse

Generating ultra-short single pulses: the attosecond lighthouse

La dynamique des électrons au sein des atomes et des molécules est extrêmement rapide, typiquement de l’ordre de la centaine d’attosecondes (1 as=10-18 s). Les expériences de type pompe-sonde, où une première impulsion vient exciter le système et une seconde le sonder après un délai variable, peuvent permettre d’explorer cette dynamique, mais nécessitent des impulsions de lumière ultra-brèves, uniques et bien caractérisées à cette échelle de temps (gamme attoseconde). Depuis une dizaine d’années, d’importants efforts de recherche ont permis de générer et mesurer de telles impulsions. Une collaboration entre les chercheurs de l’IRAMIS et du Laboratoire d’Optique Appliqué (LOA) annonce la découverte d’un nouveau procédé d’une grande simplicité pour la génération d’une impulsion attoseconde unique [1], basé sur la génération d’harmoniques en présence d’une rotation ultrarapide du front d’onde de l’impulsion laser incidente. Il est ainsi possible aujourd’hui de disposer d’une source de lumière particulièrement bien adaptée aux expériences pompe-sonde permettant l’exploration de la dynamique électronique.

L’observation de la dynamique électronique extrêmement rapide au cœur des atomes, des molécules ou de la matière condensée, nécessite l’utilisation d’impulsions dans le domaine attoseconde. De telles impulsions ne peuvent être générées par les technologies usuelles de l’optique laser : du fait de leur très courte durée, le principe d’incertitude temps-fréquence implique que le spectre associé doit être extrêmement large et s’étendre au-delà des fréquences visibles, jusque dans l’extrême UV (XUV) ou les X mous. Le seul moyen démontré à ce jour pour produire ces impulsions utilise l’interaction d’impulsions laser femtosecondes ultra-intenses avec la matière. Cette interaction induit une forte distorsion temporelle de l’onde laser à l’échelle du cycle optique, qui après filtrage en fréquence, permet d’obtenir des impulsions de durée attoseconde (Fig. 1).

Figure 1 : illustration du principe général de la génération de trains d’impulsions attoseconde par interaction laser-matière à ultra-haute intensité.

De par sa périodicité, l’onde laser incidente génère spontanément un train d’impulsions attoseconde séparées d’une période laser (Fig. 1). Cette succession d’impulsions temporellement très proches (de l’ordre de quelques femtosecondes) est difficilement utilisable pour des expériences pompe-sonde, et un enjeu majeur de ces dix dernières années a été de trouver les moyens d’isoler une impulsion attoseconde unique. Plusieurs méthodes ont ainsi été proposées depuis 2001, par suppression temporelle des impulsions adjacentes (utilisation d’impulsions laser de quelques cycles optiques seulement, ou de polarisation dépendante du temps). Elles ont permis les premières expériences pompe-sonde à l’échelle sub-femtoseconde, dans des atomes, des molécules et des solides.

Nous avons récemment mis au point une approche simple et générale pour produire des impulsions attoseconde isolées : il s’agit d’un effet que nous avons dénommé “phare attoseconde”, par lequel l’émission de chaque impulsion attoseconde du train se produit dans une direction légèrement différente (Fig. 2(a)). Au-delà de quelques millimètres de propagation après la cible, on obtient ainsi une série de faisceaux, chacun consistant en une impulsion attoseconde unique. Cet effet est obtenu en induisant une rotation temporelle ultra-rapide des fronts d’onde laser au point d’interaction avec la cible. Cette rotation se produit lorsque les différentes composantes spectrales de l’impulsion laser sont focalisées à des positions très légèrement différentes sur la cible. Ceci est réalisé en appliquant une légère dispersion angulaire sur le faisceau laser avant focalisation, par exemple au moyen de prismes (Fig.2(b)).

Figure 2 (a) Principe de l’effet de phare attoseconde. (b) Réalisation expérimentale dans le cas de la génération sur miroir plasma.

Le principe de cette nouvelle approche, proposé par l’équipe de l’IRAMIS, a tout d’abord été validé théoriquement par des simulations numériques sur les machines de calcul massivement parallèles du CCRT et du CINES [1]. La première démonstration expérimentale a été obtenue au moyen du laser de la salle noire du Laboratoire d’Optique Appliquée (LOA) à Palaiseau, dans le cadre de l’étroite collaboration existant entre ce laboratoire et l’IRAMIS [2].

En utilisant des impulsions laser de quelques cycles optiques (5 fs), fortement focalisées sur une cible solide à une intensité de l’ordre de 1018 W/cm2, des impulsions attoseconde sont obtenues par réflexion sur le “miroir plasma” généré à la surface de la cible [3], par un mécanisme appelé “émission cohérente de sillage”. En introduisant une très faible dispersion angulaire sur le faisceau laser avant focalisation, nous avons pu observer pour la première fois, et conformément aux simulations, un “phare attoseconde”, émettant trois à quatre faisceaux XUV séparés spatialement, et ne contenant chacun qu’une impulsion attoseconde unique (Fig.3).

Figure 3 Profil spatial expérimental de l’émission XUV attoseconde après interaction entre l’impulsion laser et la cible. L’effet de phare attoseconde disperse spatialement les impulsions attoseconde successives, permettant d’isoler une impulsion unique. En accord avec le modèle, la variation de la phase Φ de l’onde laser modifie la direction de propagation des impulsions, ce qui est bien observé expérimentalement.

Cet effet ouvre de nouvelles perspectives pour la nouvelle science attoseconde, en plein développement depuis 10 ans. En permettant d’obtenir, à partir d’une seule impulsion laser, plusieurs impulsions attoseconde isolées, sous forme de faisceaux bien séparés angulairement et parfaitement synchrones, les phares attoseconde constituent des sources de lumière idéales pour les futures expériences pompe-sonde visant à étudier la dynamique électronique dans la matière (Fig. 4).


Références :

[1] Attosecond lighthouses: How to use spatio-temporally coupled light fields to generate isolated attosecond pulses
H. Vincenti et F.Quéré, Phys. Rev. Lett. 108 (2012) 113904.

[2] J. Wheeler, A. Borot, S. Monchocé, H. Vincenti, A. Ricci, A. Malvache, R. Lopez-Martens, and F. Quéré, Nature Photonics, 6 (2012) 829.

[3] Concernant l’effet miroir plasma, voir les faits marquants IRAMIS et les publications associées :

Communiqué de presse commun CEA-ENSTA-CNRS.

Ces résultats ont été obtenus dans le cadre du contrat de financement ERC “Starting Grants” porté par Fabien Quéré : “Ultrahigh-Intensity Plasma Optics“.


Contacts :

F. Quéré1 ,Rodrigo Lopez-Martens2,

Contacts CEA : Fabien Quéré.