Les imogolites sont des minéraux naturels découverts en 1962 dans des sols volcaniques japonais. [1] Il s'agit d'aluminosilicates hydratés de formule (OH)3Al2O3Si(OH). Leur structure est analogue à celle d'un nanotube de carbone. Il s'agit d'un feuillet de Gibbsite Al(OH)3 refermé sur lui-même formant un cylindre de 2 nm de diamètre. Des tétraèdres de silicium sont adsorbés à l'intérieur du nanotube et lui confèrent sa courbure. Des analogues d’imogolite à base de germanium ont été découverts. La compréhension du mécanisme de formation de ces imogolites permet maintenant de produire avec un excellent contrôle des suspensions de nanotubes d'imogolite au germanium soit simple soit double paroi !
Récemment, une équipe du SIS2M (LIONS) a montré que les analogues d'imogolite à base de germanium de formulation ((OH)3Al2O3Ge(OH)) forment non seulement des nanotubes simple paroi (SW Single-Walled) de 3.5 nm de diamètre similaires à l'imogolite naturel, mais également des nanotubes double paroi (DW Double-Walled) de 4 nm de diamètre. [2]
Les nanotubes DW mis en évidence dans les analogues d'imogolite à base de germanium n'avaient jamais été observés jusqu'à ce jour et les chercheurs n'ont pas compris immédiatement les raisons de cette transition morphologique. Un nouvel article vient d'être publié à JACS. [3] Une série d'expériences a été faite afin de mieux comprendre les raisons de l'existence de ces deux morphologies. Les chercheurs ont découvert que la transition entre les morphologies SW et DW est contrôlée par une balance entre des forces attractives (électrostatique, liaisons hydrogène) et des forces élastiques liées à la déformation des nanotubes autour de leur courbure spontanée.
Les auteurs ont également montré que ce mécanisme donne une limite supérieure au nombre possible de parois dans les imogolites et les analogues d'imogolite au germanium. Ainsi, à moins de trouver une façon de rendre les parois beaucoup plus adhérentes et/ou beaucoup plus flexibles, les imogolites silicium ne peuvent pas former de tube DW et les imogolites germanium ne peuvent former de structure contenant plus de deux parois.
La famille des imogolites est donc maintenant élargie. Il est possible de produire avec un excellent contrôle des suspensions de nanotubes d'imogolite au germanium soit simple soit double paroi. Les conditions permettant d'obtenir l'une ou l'autre de ces morphologies sont bien comprises. De nouvelles manipulations chimiques sur ces tubes sont maintenant en cours d'étude notamment dans le cadre de l'ANR blanche HIMO2.
Références :
1. “Imogolite in some Ando soils” Yoshinaga, N. and Aomine, A , in Soil Science and Plant Nutrition 8, 22-29 (1962). | |
2. “Evidence of double-walled Al-Ge imogolite-like nanotubes. A cryo-TEM and SAXS investigation.” Maillet P, Levard C, Larquet E, Mariet C, Spalla O, Menguy N, Masion A, Doelsch E, Rose J, Thill A. in Journal of the American Chemical Society, 132, 1208-1209 (2010). | |
3. “Physico-chemical control over the single or double wall structure of aluminogermanate Imogolite-like nanotubes” Thill A., Maillet P., Guiose B., Spalla O., Belloni L., Chaurand P., Auffan M., Olivi L., and Claude J. in Journal of the American Chemical Society, 134,3780-3786 (2012). | |
4. “Controlling Nanotube Dimensions: Correlation between Composition, Diameter and Internal Energy of Single-Walled Mixed Oxide Nanotubes.” Konduri, S.; Mukherjee, S.; Nair, S. in ACS Nano 2007, 1, 393−402. |
Voir aussi le fait marquant :
– IRAMIS ( janvier 2010): Des nanotubes sans carbone, mais pleins de surprises !
Contact : Antoine Thill, CEA – IRAMIS/SIS2M/ LIONS : Laboratoire Interdisciplinaire sur l'Organisation Nanométrique et Supramoléculaire)