La microsonde nucléaire est un outil d’analyse non destructif permettant la caractérisation élémentaire à l’échelle du micromètre d’échantillons solides d’origines diverses : interfaces et grains de matériaux synthétisés, monocouches cellulaires, inclusions dans des échantillons géologiques terrestres et extraterrestres. La méthode repose sur la détection et la spectrométrie des radiations émises par l’interaction d’un micro-faisceau d’ions légers avec les atomes composant les éléments majeurs ou les traces des échantillons.
Au Laboratoire d’Etude des Eléments Légers (LEEL), ce faisceau est produit par un accélérateur de particules de type Van de Graaff d’une tension maximale de 3,75 MV. Différents faisceaux d’ions peuvent être produits : 1H+, 2H+, 3He+, 4He+.Le faisceau est ensuite guidé vers l’une des deux lignes de faisceaux disponibles, puis mis en forme et focalisé sur l’échantillon à analyser.
Le faisceau peut être balayé sur l’échantillon, et il est ainsi possible de construire des images et des cartes élémentaires en utilisant les spectres collectés par les différents détecteurs entourant l’échantillon.
Les interactions faisceau-atome sont de deux natures :
1 / Électronique ; en cas d’ionisation dans une couche profonde, l’ion créé émet un rayon X caractéristique. La technique issue de ce phénomène est appelée PIXE (Proton Induced X-ray Emission). Elle est particulièrement sensible aux éléments lourds (à partir de Z = 16).
2 / Nucléaire ; si la collision noyau-noyau est élastique, la particule incidente est diffusée, la technique est alors appelée RBS (Rutherford Back Scattering). L’énergie de cette particule est fonction du noyau diffusant et de la profondeur où l’interaction a eu lieu.
La technique ERDA (Elastic recoil detection analysis) consiste à détecter par transmission ou en incidence rasante le noyau de recul (léger) de la cible, éjecté après irradiation par un ion plus lourd tel que l’hélium. Cette technique est la seule qui permette une analyse quantitative précise de l’hydrogène dans les matériaux sans nécessiter l’utilisation d’étalons. Dans le cas d’une collision inélastique noyau-noyau, l’interaction est une réaction nucléaire, ce qui conduit à la technique NRA (Nuclear Reaction Analysis). Ce type d’interaction émet des fragments de noyau sous forme de particules chargées et de rayons γ. Ces deux techniques sont mieux adaptées aux éléments légers, parfois avec une sensibilité isotopique, permettant l’utilisation de traceurs isotopiques. Une autre caractéristique de cette technique est sa résolution en profondeur (dans le cas des interactions nucléaires). Il est ainsi possible de mettre en œuvre des techniques de microscopie 3D (tomographie) pour certains éléments légers.
Analyse par faisceaux d’ions sur les matériaux de batteries
La microsonde nucléaire est un outil puissant pour fournir simultanément des informations qualitatives sur les différents éléments constitutifs présents dans une électrode de batterie mais surtout pour mesurer quantitativement leur contenu et leurs distributions en fonction de son état de charge (SOC).
Pour comprendre le mécanisme de l’électrode LiFePO4 nous avons conçu une cellule électrochimique (image ci-dessous) pour établir le profil de la concentration de lithium operando dans les électrodes LiFePO4 en utilisant des techniques d’analyse par faisceau d’ions. Des informations directes sur la dégradation de l’électrolyte sont obtenues. En particulier, nous avons révélé des distributions inhomogènes de lithium et de fluor sur toute l’épaisseur de l’électrode. Des concentrations plus élevées de fluor sont observées près de l’interface électrode/électrolyte, tandis qu’un appauvrissement en lithium est détecté près du collecteur de courant à des états de charge élevés.