Des cellules solaires pérovskite stables 6 mois, en conditions de fonctionnement réelles extérieures

Des cellules solaires pérovskite stables 6 mois, en conditions de fonctionnement réelles extérieures

Les cellules solaires pérovskites suscitent un intérêt croissant en raison de leur remarquable efficacité, de leur flexibilité et de la possibilité de les réaliser à faible coût. Toutefois, leur perte rapide de performance empêche leur diffusion à grande échelle.

En 2017, une collaboration d’équipes de recherche autour de l’entreprise Solaronix rapporte l’obtention d’une PSC basée sur une jonction pérovskite 2D/3D présentant une stabilité de plus de 10 000 heures, mesurée dans des conditions standard contrôlées [1]. Cette structure est basée sur une architecture entièrement imprimable composée de trois couches mésoporeuses intégrant la pérovskite et une contre-électrode en carbone. Cet élément s’avère être particulièrement efficace pour améliorer de façon significative la durée de vie du système. Depuis lors, ces architectures très prometteuses se sont imposés pour la prochaine génération de cellules PSC, avec des rendements supérieurs à 20 % et des stabilités sans précédent.

Cette avancée a donc incité la collaboration, en incluant cette fois l’équipe du NIMBE/LICSEN, à étendre l’étude en soumettant les cellules aux conditions de fonctionnement en extérieur (température, intempéries, UV…) qui sont des paramètres rarement pris en compte. Un banc de test sur le site du SIRTA (Site Instrumental de Recherche par Télédétection Atmosphérique) a permis une étude complète montrant une bonne durabilité sur 6 mois des cellules PSC étudiées [2].


Les cellules photovoltaïques pérovskites (PSC), de formule générique ABX3, présentent une facilité de réalisation et de bons rendements, mais leurs performances s’altèrent rapidement dans le temps. De plus, les dispositifs les plus performants utilisent tous de l’or ou de l’argent comme contact arrière en conjonction avec des matériaux transporteurs de trous (HTM) agissant comme des couches de blocage des électrons. L’utilisation de ces métaux nobles limite l’application à grande échelle de la PSC et sont également une source d’instabilité.

Pour réussir leur entrée sur le marché photovoltaïque, ces cellules PSC doivent ainsi relever encore plusieurs défis de taille : développer les processus de réalisation, améliorer la résistance à l’eau, en température ou aux UV du matériau, ainsi que la stabilité à long terme des dispositifs. Ce dernier point reste en particulier l’une des principales causes de scepticisme sur l’avenir de la filière. Seuls quelques rapports sur l’utilisation en condition d’utilisations réelles peuvent être trouvés. [3,4]. Ils montrent qu’à mesure que la durée des essais augmente, les dispositifs subissent des dégradations irréversibles, qui peuvent ne pas être détectées par une procédure du seul suivi en laboratoire du point de puissance maximale (MPP), dans des conditions de température et d’irradiation constantes. Ce résultat implique donc la nécessité d’effectuer des essais en extérieur dans des conditions réelles de fonctionnement.

Conscient de ce défi, ce travail décrit les performances de cellules solaires pérovskites stables fonctionnant dans des conditions réelles en région parisienne. Leurs performances sont comparées sur six mois, et une analyse détaillée est menée sur l’hystérèse courant-tension et leur réponse électrique selon les différentes conditions météorologiques. La stabilité de l’architecture de cellule employée a pu également être établie dans des conditions standard contrôlées en laboratoire sur la même durée.

L’étude réalisée en extérieur publiée dans Solar RRL [2] se distingue des recherches précédentes par l’examen approfondi des effets observés sur des PSC selon deux conditions de fonctionnement réalistes distinctes :

  • suivi en continu du point de puissance maximale (PPM) et toutes les heures de la mesure de la courbe caractéristique courant-tension,
  • suivi de cellules connectées à une charge résistive fixe.

Architecture triple mésoscopique et image MEB d’une PSC à contre électrode carbone.

Les cellules ont été montées sur un support métallique orienté vers le sud avec une inclinaison de 30° sur le banc d’essai photovoltaïque de l’observatoire SIRTA (Site Instrumental de Recherche par Télédétection Atmosphérique) situé à l’École Polytechnique de Palaiseau, France (48,7N, 2,2E). Ce banc d’essai photovoltaïque a été mis en place en 2014 et accueille plusieurs panneaux solaires commerciaux de différentes technologies, mais a récemment commencé à accueillir des PSC pour des essais en extérieur.

Cellules pérovskites PSC et le banc d’essai au SIRTA.

Au cours des six mois de l’étude, les cellules ont été exposées au large éventail de conditions météorologiques typiques de la région parisienne, allant de journées nuageuses avec un faible ensoleillement (< 100 W/m²), un taux d’humidité de l’ordre de 70%, des températures proches de 0° C, à des journées chaudes (35 °C) et ensoleillées, avec des niveaux d’irradiation dépassant 1100 W/m² avec une vague de chaleur et des orages.

L’analyse des performances extérieures montre la stabilité à long terme des PSC à contre électrode carbone selon les deux modes de fonctionnement étudiés. Une baisse de rendement au bout de 4 mois est cependant observée pour la cellule en mesure suivie du point de puissance maximale (PPM). Cette baisse se révèle à l’analyse être principalement liée au multimètre utilisé, à l’origine de la dégradation de la cellule PV. Cette observation signale la difficulté de disposer d’équipements et algorithmes fiables pour ce type de test de très longue durée en conditions réelles de fonctionnement.

En haut : mesure en conditions contrôlées en laboratoire de l’efficacité relative de cellules PSC (Pérovskites Solar Cell) à contre électrode carbone : la mesure sur les cellules connectées à une résistance de charge montre une perte de performance inférieure à 30 % sur 11 mois.

Au milieu : évolution de l’efficacité de conversion photovoltaïque en conditions extérieures sur une période de 6 mois, pour une cellule connectée à une charge résistive fixe,

En bas : même type de mesure au cours du suivi du point de puissance maximale (PPM). Ce type de mesure en continu contribue à une altération de la cellule significative au-delà de 4 à 5 mois.

Ce suivi long terme des performances de cellules à structure PSC est donc prometteur et laisse présager qu’obtenir une bonne stabilité des structures pérovskites est possible. Comme le montre la baisse observée en condition de mesure PPM externe, les cellules restent cependant fragiles et dépendantes de bonnes conditions d’utilisation et des efforts de développement restent encore nécessaires pour prolonger l’étude sur des cellules de plus grande taille et d’efficacité supérieure, en normalisant la collecte des données et leur analyse.

Contact CEA : Frédéric Oswald (NIMBE-LICSEN).

Références :

[1] G. Grancini, C. Roldán-Carmona, I. Zimmermann, E. Mosconi, X. Lee, D. Martineau, S. Narbey, F. Oswald, F. De Angelis, M. Graetzel & Mohammad Khaja Nazeeruddin, Nat. Comm. 8 (2017) 15684.

[2] Six-month outdoor performance study of stable perovskite solar cells under real operating conditions,
Joseph Chakar, Frédéric Oswald, Anne Migan Dubois, Emma Stéphan, Stéphanie Narbey, Johan Parra, Jean-Baptiste Puel, Yvan Bonnassieux, Sol. RRL 2024, 8, 2400093.

[3] Liangcong Jiang, Jianfeng Lu, Sonia R. Raga, Jingsong Sun, Xiongfeng Lin, Wenchao Huang, Fuzhi Huang, Udo Bach, Yi-Bing Cheng, Nano Energy 58 (2019) 687

[4] Konrad Domanski, Essa A. Alharbi, Anders Hagfeldt, Michael Grätzel & Wolfgang Tress, Nat. Energy 3 (2018) 61


Collaboration :