Le transport polarisé en spin dans les jonctions tunnel épitaxiées à base de MgO est expliqué en considérant d’une part la structure électronique particulière de la structure BCC des métaux de transition le long de la direction (001) et d’autre part le filtrage en symétrie de la barrière MgO. Des TMR gigantesques sont alors prévues par les calculs
ab initio pour des électrodes à base d’alliage équimolaire ordonné FeCo ou de Co. Ce travail théorique a conduit la communauté à considérer que plus l’alliage FeCo est riche en Co, plus la TMR doit être grande. Nous reportons cependant ici une anomalie dans le transport dans les jonctions tunnel à base de FeCo : si la TMR augmente lorsqu’on augmente la concentration de Co jusqu’à 25%, elle diminue brusquement pour de concentrations plus grandes. Il est de plus remarquable de noter qu’un comportement identique est observé sur des jonctions à base de FeCoB réalisées en pulvérisation cathodique. De plus, une signature très particulière apparaît sur les courbes de conductance.
Pour comprendre le transport tunnel dans ces objets idéaux, il est nécessaire d’obtenir des informations à la fois résolues en spin, mais également en symétrie. Les expériences de transport contiennent ces informations, notamment sur les conductances en fonction de la tension, comme en spectroscopie tunnel, mais de façon intriquée. La ligne CASSIOPEE du synchrotron SOLEIL dédiée à la photoémission offre en revanche des possibilités remarquables pour ce type d’étude (résolution en spin, possibilité de travailler à très basse énergie, possibilité de résolution en symétrie en combinant la faible ouverture angulaire du détecteur et la possibilité de modifier la polarisation du faisceau incident).
Nous avons utilisé cette technique pour étudier les propriétés électroniques des alliages épitaxiés FeCo utilisés comme électrode à forte polarisation dans les jonctions tunnel à barrière MgO. Nous montrons en photoémission à la fois résolue en spin et en symétrie qu’un nouvel état minoritaire de symétrie Δ1 apparaît près de EF au delà de 50% de Co, expliquant ainsi les résultats de transport. La photoémission résolue en angle nous a permis de démontrer que c’est un état de surface qui existe toujours lorsque que l’alliage est recouvert de MgO. L’analyse de ces résultats a été également rendue possible grâce à des calculs ab initio qui prennent en compte le désordre chimique entre Co et Fe dans la structure cubique centrée. La conjonction des expériences de photoémission et des calculs nous a permis de comprendre les conductances très particulières en fonction de la concentration de Co.
Institut Jean Lamour, Nancy Université/CNRS