Matériaux du patrimoine

La spécificité des matériaux du patrimoine réside dans la complexité des systèmes dont les caractéristiques physicochimiques (microstructure, composition) sont hétérogènes jusqu’aux échelles nanométriques. Dans le cadre des études menées au NIMBE, ces matériaux du patrimoine sont étudiés en suivant deux grands axes thématiques : (i) la compréhension des productions historiques (métaux, verre, et pour des matériaux plus récents les plastiques) grâce à des collaborations interdisciplinaires (historiens, archéologues) (ii) l’étude de l’effet du temps long sur leur évolution. Ces problématiques intéressent les industriels pour bénéficier de retours d’expériences sur l’état de dégradation en conditions naturelles de ces matériaux (évolution de la chimie et des propriétés mécaniques de plastiques par ex). Ils peuvent être exploités comme analogues pour la prévision du comportement à long terme de matériaux utilisés dans le cadre du stockage des déchets radioactifs (analogues archéologiques ferreux pour la corrosion des aciers, analogues vitreux pour le colis de déchet). Différentes méthodologies combinant des techniques multi-échelles pour déterminer les propriétés de ces matériaux anciens sont nécessaires pour comprendre les mécanismes fins de dégradation. Enfin un axe est consacré au développement de traitements innovants de préservation de ces objets patrimoniaux dans le cadre de thématiques initiées en conservation-restauration.

Matériaux et irradiation

Les recherches portent sur des études fondamentales du comportement sous irradiation d’une grande variété de matériaux utilisés notamment dans le contexte de l’électronucléaire (alliages métalliques, verres, céramiques, polymères). Les expériences mettent en jeu des outils d’irradiation externes (accélérateurs d’ions ou d’électrons), et bénéficient en parallèle d’importants efforts de simulation.

Les études portent en particulier sur l’évolution microstructurale des matériaux (et le vieillissement associé) ainsi que l’évolution de leurs propriétés qui en résulte (fragilité, résistance à la corrosion, réactivité chimique…), en liaison avec leurs utilisations potentielles.

Corrosion long terme de matériaux métalliques 

Plusieurs pays envisagent de développer une technologie de barrières multiples pour la sécurité du stockage des déchets nucléaires. Une question centrale est de savoir modéliser le comportement sur le long terme (soit 100 à 1000 ans) des matériaux utilisés, en particulier des containers, en acier faiblement allié, et de la matrice vitrifiée.

Dans ce cadre général, le NIMBE/LAPA cherche à mettre en évidence les mécanismes de corrosion à long terme de systèmes contenant des alliages ferreux et du verre dans les divers milieux envisagés pour le stockage profond ou les stockages provisoires (atmosphère, béton et liants hydrauliques).

La méthode est basée sur l’étude d’analogues archéologiques provenant de sites de référence sur lesquels il est possible de mesurer les paramètres environnementaux et de disposer d’un nombre d’objets suffisants pour une étude en laboratoire. Ceux-ci sont ensuite étudiés à différentes échelles de l’échelle macroscopique à celle du nanomètre. L’étude d’échantillons altérés dans des conditions contrôlées en laboratoire complète l’approche.

Analyse métallographique du fer des grands bâtiments du Moyen Age (LAPA)

Les études menées depuis une vingtaine d’années sur la construction religieuse gothique ont brisé le mythe d’une architecture de pierre dépouillée de tout artifice, où des matériaux affublés de nombreux préjugés comme le fer, n’avaient pas leur place. Le discours s’est tant et si bien renversé que Ph. Bernardi introduit dans son article récemment consacré au Palais des Papes d’Avignon l’expression « Squelette de pierre ou squelette de fer ». Les différentes recherches menées sur le sujet sont cependant de portée inégale : beaucoup relèvent de la simple observation et peu d’entre elles font appel à tous les savoirs dont peuvent disposer l’archéologue, l’historien ou encore l’architecte, qui sont cependant nécessaires si l’on veut comprendre dans son ensemble la question de l’utilisation du fer dans l’architecture gothique. En effet, parallèlement aux prospections dans le bâti, qu’elles soient visuelles ou à l’aide d’un détecteur de métal, parallèlement à l’étude des archives médiévales avec les comptes des Fabriques, mais aussi contemporaines avec les registres des restaurations depuis le XIXe siècle, parallèlement donc, à ces outils traditionnels de l’archéologue ou de l’historien, l’analyse métallographique offre des perspectives différentes et complémentaires au chercheur du métal. Elle lui permet de retracer une partie de l’histoire de l’objet avant sa mise en œuvre dans le monument et de tenter de comprendre avec lui les différents gestes du forgeron constituant l’ensemble de la chaîne opératoire menant du minerai au produit fini. A ce jour notre équipe a pu étudier les alliages ferreux utilisés dans un certains nombre de bâtiments du Moyen Age tels que le Palais des Papes en Avignon, la Cathédrale de Rouen, le château de Vincennes.

Science des matériaux et chimie pour l’archéologie et le patrimoine

Au delà des études visant à mieux comprendre et prédire l’altération des métaux anciens, l’équipe du LAPA utilise la science des matériaux et les méthodes de la chimie pour comprendre certains aspects des sociétés antiques en lien avec leur niveau technologique.

Ceci, selon trois axes principaux :

  • Comprendre la manufacture des objets métalliques et son organisation dans les sociétés anciennes
  • Déterminer la provenance des objets métalliques anciens
  • Dater les objets archéologiques