C. Mariet, V. Geertsen *
La spectrométrie de masse est une technique instrumentale d’analyse reposant sur la séparation, l’identification et la quantification des éléments constitutifs d’un échantillon en fonction de leur masse. Elle est basée sur le couplage d’une torche à plasma générant des ions et d’un spectromètre de masse quadripolaire (dans le cas de l’ICP—MS Thermoelectron X7) qui sépare ces ions en masse.
L’analyse des échantillons par ICP-MS peut être divisée en quatre étapes : introduction-nébulisation, ionisation, séparation en masse, détection.
L’échantillon est mis en solution. Un passeur automatique d’échantillons (type AS 90) couplé à une pompe péristaltique introduit la solution dans une chambre de vaporisation où le nébuliseur la transforme en un aérosol liquide composé de micro-gouttelettes de quelques µm à l’aide d’argon gazeux. L’aérosol ainsi formé est envoyé dans une torche à plasma d’argon (15 l.min—1) à très haute température (entre 6 000 et 10 000 °C), suffisante pour vaporiser, dissocier, atomiser et ioniser complètement la plupart des éléments.
Une partie de ce plasma (10%) est échantillonnée par un premier orifice de 1 mm de diamètre environ au sommet d’un cône en nickel ou en platine (« le sampler »), puis se détend sous l’effet du vide modéré (1—2 mbar) qui règne dans une chambre de pompage différentiel (qui permet de passer de la pression atmosphérique au vide secondaire du spectromètre de masse) et passe ensuite dans un deuxième orifice (« le skimmer »). Un système de vide différentiel accélère les ions du plasma vers un ensemble de lentilles électrostatiques qui extrait les ions chargés positivement et les transporte vers un filtre de masse quadripôlaire. Cet ensemble de lentilles est aussi appelé lentille ionique.
Ce filtre de masse transmet seulement les ions présentant un rapport masse sur charge particulier, déterminé en fonction de la fréquence appliquée au quadripôle. Le principe du spectromètre est basé sur la séparation des éléments en fonction de leur charge et de leur masse. Les quatre barres cylindriques qui composent le spectromètre sont séparées en deux paires opposées et soumises à un courant continu (DC) et alternatif (RF). Les deux paires ont des tensions continues opposées et des tensions alternatives de même amplitude et de signe opposé. Dans le plan formé par la paire positive les ions légers sont trop déviés et heurtent les barres. L’ion à analyser et ceux ayant une masse supérieure restent entre les deux barres. Dans ce plan le quadripôle joue le rôle de filtre passe-haut. Dans le plan de la paire négative, ce sont les ions lourds qui sont déviés, ce qui équivaut à un filtre passe-bas. En combinant ces deux filtres, seuls les ions ayant le rapport m/z (masse/charge) désiré seront transmis au détecteur.
Clarisse MARIET 01 69 08 49 60
La partie détection s’effectue grâce à un multiplicateur d’électrons à dynodes discrètes. Pour la détection des ions positifs, une série de dynodes est soumise à une tension négative de quelques milliers de volts. L’extrémité de la série de dynodes est reliée à la terre. A la sortie du quadripôle, un ion positif, attiré par la tension négative, heurte la surface semi-conductrice de la première dynode. Cet ion positif provoque l’émission d’un ou de plusieurs électrons secondaires qui heurtent à nouveau la paroi de la deuxième dynode : un effet « boule de neige » se produit. A l’extrémité de la série de dynodes, pour un ion qui heurte le détecteur, environ 100 électrons atteignent un collecteur équipé d’un préamplificateur. Le signal se traduit en nombre d’impulsions (nombre de coups), une interface informatique assure le transfert des données afin qu’elles soient traitées. Pour un isotope donné, le nombre d’ions mesuré permet de calculer directement la concentration de l’élément analysé grâce à un logiciel de traitement quantitatif et qualitatif de l’enregistrement. Les nombres de coups sont convertis en concentrations grâce à l’utilisation de deux types de calibrations : externe (solutions étalon) et interne (spikes). Pour les matrices complexes telles que les roches, un traitement supplémentaire des données est nécessaire.
L’ICP—MS est devenue incontournable pour l’analyse simultanée des éléments en trace et « ultra-traces » (éléments dont la teneur est inférieure à 10—6 g/g) et pour la détermination des rapports isotopiques dans les roches, l’eau, les sols, les systèmes biologiques. En » routine », cet appareil permet d’analyser en quelques minutes 20 à 30 éléments différents dans les matériaux les plus variés. Il est par ailleurs doué d’une excellente sensibilité, lui permettant de détecter des éléments présents au niveau du ppt dans une solution de roche ou dans de l’eau. Sans aucune séparation chimique, il permet l’analyse de nombreux éléments en trace au niveau du ppb (10—9 g/g). La précision varie d’un élément à l’autre en fonction du potentiel d’ionisation et des matrices étudiées, l’incertitude moyenne « de routine » étant inférieure à 3 %.