DREAM : Un premier diffractomètre neutrons à ESS pour la communauté scientifique Européenne

DREAM : Un premier diffractomètre neutrons à ESS pour la communauté scientifique Européenne

La Source Européenne de Spallation (« European Spallation Source » ou ESS), actuellement en construction à Lund en Suède, sera à l’horizon 2027 la source de neutrons la plus puissante au monde au service de la recherche sur les matériaux et les Sciences de la vie. Ce projet est piloté par un consortium international dont la France est partenaire et repose sur un modèle de contributions où les différents pays fournissent équipements et expertises pour l’ensemble de l’installation. Le CEA participe, entre autres, à l’accélérateur de protons ainsi qu’au design et à la construction de plusieurs spectromètres de neutrons sur lesquels, à terme, des utilisateurs de tous pays viendront réaliser leurs expériences.

Le spectromètre DREAM, construit en partenariat entre le Laboratoire Léon Brillouin (DRF/IRAMIS/LLB) et le Forschungzentrum Jülich (FZJ, Allemagne) pour un montant de 12 M€, sera un des premiers instruments mis en service. Il permettra des mesures de diffraction sur des échantillons de poudres ou monocristallins avec un flux de neutrons et une gamme de résolution inégalés et offrira un large choix de conditions de mesures (température, pression…).

Le spectromètre par temps de vol DREAM (« Diffraction Resolved by Energy and Angle Measurements ») sera principalement dédié aux mesures sur des échantillons polycristallins pour lesquels il permettra d’accéder simultanément à des mesures de diffusion de neutrons aux petits angles, permettant des caractérisations jusqu'à l'échelle du nanomètre), et de diffraction, avec une résolution comparable à celle des rayons X. Il permettra également de réaliser des mesures permettant une analyse PDF (« Pair Distribution Function », donnant la probabilité de trouver un atome à une distance “r” d’un atome donné). Grâce à son flux et à son détecteur couvrant un large angle solide, il sera possible d’obtenir des informations sur des échantillons de quelques millimètres-cubes, avec une résolution temporelle meilleure que la seconde. L’instrument sera particulièrement adapté à la détermination des structures de grande maille cristalline (comme les zéolithes et MOFs). Les possibilités d'études seront larges couvrant de multiples domaines : matériaux pour le stockage de l’hydrogène ou les batteries, catalyseurs, ou encore de nouveaux composés combinant magnétisme et supraconductivité.

En pratique, DREAM combinera les neutrons issus des modérateurs thermique et froid et tirera parti du pulse long émis par ESS pour offrir un choix flexible de résolution et d’intensité grâce à une combinaison de modulateurs situé dans la partie amont de la ligne, au niveau du bunker. Ces neutrons seront ensuite guidés sur ~70m avant d’entrer dans la salle expérimentale abritant la zone échantillon et le détecteur (Figure 1). Le contrôle de l’instrument et le traitement des signaux détectés seront réalisés dans la salle de contrôle adjacente où les chercheurs pourront analyser en temps réel le signal expérimental.

Figure 1. Implantation de DREAM à l’ESS

Techniquement, le LLB est responsable de la salle expérimentale. Celle-ci est dimensionnée pour protéger les utilisateurs du fort rayonnement frappant l’échantillon (murs béton de 80 cm d’épaisseur) et offrir la place nécessaire pour abriter les détecteurs et l’environnement échantillon, tout en permettant divers scénarios d’accès aux échantillons et aux maintenances. Cette salle a été construite en coulant du béton, sur place et par niveaux, dans des blocs de béton préfabriqués (Figure 2) afin de garantir une continuité de matière et éviter les fuites neutroniques tout en permettant une déconstruction simplifiée. La salle est divisée en deux zones distinctes placées en série par rapport au faisceau, permettant des mesures simultanées sur un même instrument, la seconde zone utilisant le faisceau transmis issu de la première zone principale.

Figure 2. Construction de la salle expérimentale coprenant 2 zones, par coulage béton en niveaux (voir la vidéo)
Figure 3. Aire instrumentale de DREAM dans le hall ESS. L’infrastructure externe de la salle expérimentale comprend un élévateur, un sol technique et un accès au toit.
Figure 4. Vue intérieure de la casemate échantillon et de son infrastructure.

L’infrastructure interne (Figure 4) comprend une plateforme surélevée entourant les détecteurs avec une partie motorisée télescopique pour accéder à l’échantillon par le haut, un pont roulant 2 tonnes et un sol technique permettant de partager un niveau identique entre l’intérieur et l’extérieur. Il permet aussi un accès aisé au niveau du faisceau situé à 1.3 m de hauteur (contre 2.1 m sans sol technique) ainsi qu’un espace pour le passage des câbles et fluides. La salle expérimentale comporte de multiples interfaces avec le hall et les équipements réalisés par nos partenaires allemands tels que la protection biologique (écrans) des guides amont permettant l’acheminement des neutrons, l’intégration des salles de contrôle et de préparation des échantillons, l’intégration des détecteurs, les raccordements électriques et fluides et les organes de sécurité et de surveillance d’accès (portes, toit, zones internes de la salle).

Les travaux d’installation ont débuté le 10 Janvier 2022 et ont été achevés avec la recette sur site le 5 septembre 2022.

Références :

[1] The instrument suite of the European Spallation Source”
K. Andersen et al, Nucl. Inst. Met. A v.957 (2020) 163402.

[2] “DREAM – a versatile powder diffractometer at the ESS”
W. Schweika, N. Violini, K. Lieutenant, C. Zendler, D. Nekrassov, A. Houben, P. Jacobs and P. F. Henry, J. of Phys.: Conf. Ser. 746 012013 (2016)

[3] Les projets ESS du LLB.

[4] ESS : la source de spallation européenne – Conception de l'accélérateur.


Contacts CEA-IRAMIS : Florence Porcher, Sylvain Désert, UMR LLB CEA-CNRS

Collaboration :