Dans un matériau antiferromagnétique les aimantations portées par les atomes sont tête-bêche de proche en proche ; l’ordre antiferromagnétique s’établit sur des mailles doubles (au moins dans une direction) par rapport aux mailles structurales (figure 1b). Il en résulte une aimantation globale nulle et par conséquent une grande difficulté pour la mesure des propriétés magnétiques, en particulier les méthodes de magnétométrie classiques sont inadaptées. De plus, si on porte son intérêt sur la région de surface (quelques nanomètres) la situation devient encore plus délicate à cause de la réduction géométrique de la quantité de matière sondée ; dans cette limite même les expériences basées sur l’interaction avec les neutrons deviennent difficiles. Cependant, les substrats antiferromagnétiques jouent un rôle primordial dans les capteurs magnétiques modernes (tête de lecture de disques durs, mémoires magnétiques permanentes…) car ils assurent le durcissement magnétique d’une des couches ferromagnétiques du capteur ; la compréhension de ses propriétés est un enjeu important tant d’un point de vue fondamental que dans une approche orientée vers les applications de type électronique de spin. Afin de surmonter ces difficultés et d’appréhender l’antiferromagnétisme sur un matériau modèle comme NiO(111) [A.Barbier et coll.,
Physical Review Letters 84 (2000) 2897 et
Physical Review B 62 (2000) 16056 ] on a proposé une approche expérimentale nouvelle basée sur le rayonnement synchrotron. En effet, celui-ci est fortement et naturellement polarisé dans le plan de l’orbite des particules circulant dans l’anneau synchrotron et seule l’aimantation peut, en interagissant avec les photons, provoquer une modification (rotation de phase) de la polarisation. La géométrie expérimentale (figure 1a) s’inspire à la fois de la diffraction de surface pour laquelle l’angle d’incidence est maintenu fixe et de la diffraction magnétique où un cristal analyseur permet d’identifier la polarisation des photons diffractés. Les expériences ont été réalisées hors résonance avec un cristal analyseur PG(006) à une énergie de photons de 7981 eV. L’angle d’incidence permet de choisir la profondeur sondée et l’analyse de polarisation rend possible la séparation du signal structural du signal magnétique (figure 1c) qui bien plus faible (le minimum de diffusion due à la surface est environ 100 fois plus intense que le maximum de la diffraction magnétique).