L’eau confinée en milieu hydrophobe : vers un nouveau diagramme de phase

Le 22 octobre 2021
Types d’événements
Thèses ou HDR
Oriana Osta-Rangel
LCP bâtiment 349, salle Magat, 310 rue Michel Magat, Orsay
Le 22/10/2021
de 14h00 à 17h00

Manuscrit de la thèse


Résumé :

L’eau confinée dans des nanopores amphiphiles et hydrophobes joue un rôle vital dans la nature. Ici, nous avons étudié l’effet de différents niveaux d’hydrophobicité sur le comportement de phase de l’eau confinée.

Tout d’abord, nous avons synthétisé des organosilices nanoporeux (de type MCM-41) avec différentes densités de groupes organiques à la surface pour les utiliser comme matériaux de confinement modèles. Nous avons utilisé une approche de synthèse directe pour les matériaux amphiphiles et de post-greffage pour les hydrophobes. Nous avons ensuite réalisé une caractérisation complète de la structure des pores, de la morphologie et de la chimie de surface des matériaux, en utilisant l’IRTF, l’ATG, l’adsorption d’azote et de vapeur d’eau, la diffusion des neutrons à petits angles, et la microscopie électronique en transmission. Les matériaux amphiphiles présentent des pores cylindriques indépendants avec des diamètres d’environ 4,5 nm et de grandes capacités d’adsorption d’eau à la pression atmosphérique. Les matériaux hydrophobes présentent des pores légèrement plus petits (D ∽ 4 nm) où l’eau ne se condense pas à basse pression. Nous avons constaté que le niveau d’hydrophobicité des matériaux amphiphiles amplifie les effets du confinement, en abaissant sa densité et son point de fusion au-delà de l’attendu pour les nanopores hydrophiles.

En mesurant la structure cristalline de la glace à la pression atmosphérique par diffraction des neutrons, nous avons trouvé de la glace à défauts d’empilement (I indice SD) avec environ 30 % de couches hexagonales (I indice h) et 70 % de couches cubiques (I indice c). Les résultats de la calorimétrie différentielle à balayage (DSC) et de la diffraction des neutrons indiquent la présence d’une fraction d’eau non congelable allant de 45 % à près de 80 %, augmentant avec le niveau d’hydrophobicité. Nous proposons que cette eau liquide et amorphe présente une distribution non-homogène autour des grains de glace, en particulier à proximité des groupes organiques à la surface des nanopores amphiphiles.

Nos résultats préliminaires d’écho de spin neutronique, indiquent que les groupes organiques à la surface sont responsables du ralentissement des molécules d’eau qui les entourent, empêchant la croissance des grains de glace. La pression d’intrusion de l’eau dans les nanopores hydrophobes, déterminée par imagerie neutronique, était d’environ 400 bars, et une hystérésis significative a été trouvée pour l’extrusion, qui s’est produite à une pression presque atmosphérique.

En utilisant la diffraction des neutrons à haute pression, nous avons découvert que l’eau confinée dans des nanopores hautement hydrophobes cristallise en formes de glace de densité plus élevée (glaces II et III) à des pressions significativement plus basses que prévu. Les transitions de phase de la glace II confinée à la glace III puis à l’eau liquide sont réversibles et reproductibles.

Ces résultats nous ont permis de tracer de nouvelles lignes de transition dans le diagramme de phase pression-température de l’eau lourde confinée dans des nanopores hydrophobes.

Mots-clés : Confinement, Nanomaterials, Amphiphilic, Hydrophobicity, Neutron diffraction.


Water confined in hydrophobic nanopores: towards a new phase diagram

Abstract:

Water confined in hydrophobic cavities is ubiquitous in nature, but the effect of hydrophobicity on its phase transitions is still debated. Herein we have studied this effect on the liquid-solid transitions of confined water.

First, we synthesized nanoporous organosilicas (MCM-41-type), with different densities of organic groups at the surface, to use them as model confining materials. We used a direct synthesis approach for the amphiphilic materials and post-grafting for hydrophobic. Then, we performed a comprehensive characterization of the materials’ pore structure, morphology, and surface chemistry, using FTIR, TGA, N2 and H2O adsorption, SAXS, TEM, and neutron backscattering. Results show that the amphiphilic materials present cylindrical, independent pores with diameters around 4.5 nm and large water adsorption capacities at atmospheric pressure. On the other hand, the hydrophobic materials present slightly smaller pores (D ~4 nm) where water does not condense at low pressures. We found that higher hydrophobicity levels in amphiphilic materials enhance the effects of confinement, lowering its density and melting point beyond the expected for hydrophilic nanopores.

We measured the crystalline structure of the confined ice at atmospheric pressure using neutron diffraction, and we found stacking-disordered ice (I indice SD) with around 30 % hexagonal (I indice h) and 70 % cubic (I indice c) layers. DSC and neutron diffraction results indicate the presence of a non-freezable fraction of water ranging from 45 % to nearly 80 %, increasing with the hydrophobicity level. We propose that this liquid-like, amorphous water presents a non-homogeneous distribution around the ice grains, especially neighboring the organic groups at the surface of the amphiphilic nanopores.

From our preliminary neutron spin echo results, we conclude that the organic groups at the surface are responsible for slowing down the water molecules that surround them, hindering the ice grain growth.The water intrusion pressure in hydrophobic nanopores, determined by neutron imaging, was around 400 bar, and a significant hysteresis was found for the extrusion, which occurred at nearly atmospheric pressure.

Using neutron diffraction at high pressures, we found that water confined in highly hydrophobic nanopores crystallizes into higher density ice forms (ices II and III) at pressures significantly lower than expected. The phase transitions from confined ice II to ice III and then to liquid water are reversible and reproducible.

These results allowed us to draw new transition lines to the pressure-temperature phase diagram of water confined in hydrophobic nanopores.

Keywords:
Confinement, Nanomatériaux, Amphiphile, Hydrophobicité, Diffraction des neutrons.

Laboratoire Léon Brillouin – LLB/MMB