Introduction
Depuis plus de 15 ans notre groupe s’intéresse au miroir plasma, un objet d’étude du couplage fin entre les lasers avec des impulsions brèves et intense et la matière. A haute intensité (>1016W/cm2), ils génèrent des sources de rayonnement UV-X attosecondes, dans la direction spéculaire du laser incident, dont l’étude renseigne sur la dynamique ultrarapide du plasma créé. Ils permettent également,
en tant que tels, de générer des sources de particules, et en particulier des paquets d’électrons relativistes de forte charge, et couplés à une source gazeuse de produire des injecteurs de qualité pour les applications. Le couplage entre les expériences et les simulations a permis de d’obtenir des résultats majeurs dans le domaine, dont les plus récents sont présentés dans la suite.
représentation schématique de la physique des miroirs plasmas : Lors de l’interaction avec un faisceau laser intense, les miroirs plasmas réfléchissent le faisceau laser incident dans la direction spéculaire avec une réflectivité supérieure à 70% (image en bas à gauche). Le couplage hautement non linéaire avec le champ (image en haut à gauche-extraite de simulations PIC) mène à l’émission de faisceaux harmoniques d’ordre élevé et d’électrons relativistes. Une image typique de ces faisceaux est présentée au centre, et leur distribution spectrale respective sur les images de droite (issues d’expérience sur la plateforme UHI100)
Les miroirs plasmas sont également pressentis comme dispositifs permettant de booster l’intensité laser des systèmes PW actuels, dans l’espoir d’atteindre un jour la limite de Schwinger et étudier les processus d’électrodynamique quantique en champ fort.
Dynamique Chaotique
Une collaboration entre les équipes du LIDYL au CEA Saclay et de l’ATP du Lawrence Berkeley National Lab (LBNL) a permis d’élucider les mécanismes d’absorption d’un faisceau laser ultra-intense, lors de sa réflexion sur un plasma dense formé à la surface d’une cible solide.
Ces mécanismes, jusqu’alors non identifiés pour des intensités lasers > 1018 W.cm-2, interviennent dans de nombreux processus laser-plasma, tels que la production de faisceaux d’électrons
et d’ions relativistes ou de faisceaux de lumière de courte longueur d’onde (émission d’harmoniques Doppler d’ordre élevé), aux multiples applications (spectroscopies, irradiations, médecine…).
La compréhension fine de ces mécanismes, rendue possible grâce la combinaison de résultats expérimentaux et numériques de premier plan, permettra d’optimiser ces nouvelles sources de particules et de lumière.
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Les méthodes de compression temporelle des impulsions lasers de forte puissance permettent d’obtenir des impulsions de durée femtosecondes (10-15 s) et d’atteindre ainsi des intensités extrêmes (I > 1018 W.cm-2), avec lesquelles on peut explorer l’interaction lumière-matière, dans des conditions jusqu’alors inconnues. Lorsque de telles impulsions laser sont focalisées sur une cible solide, celle-ci est quasi-instantanément ionisée en surface et forme un plasma dense en électrons, réfléchissant pour le champ laser incident.
Dans la présente étude, une collaboration entre des chercheurs du CEA Saclay et du LBNL révèlent que le paramètre crucial pour décrire le mécanisme de couplage entre une impulsion laser et un plasma en régime relativiste est la longueur de gradient L, caractéristique de l’expansion spatiale du plasma. La valeur de L peut être ajustée en prélevant une partie de l’impulsion principale pour obtenir une préimpulsion d’intensité bien définie, qui suivant un chemin optique plus court, peut atteindre la cible avant l’impulsion principale et avec une avance réglable. Cette première impulsion crée un plasma initial, dont la densité et l’expansion sont ainsi contrôlés de façon très fine. Une meilleure maitrise de la qualité des deux impulsions lasers de haut contraste successives a permis aux chercheurs de mettre en lumière deux régimes bien distincts de couplage du plasma avec l’impulsion laser principale, l’un se produisant pour des longueurs de gradient L bien plus courtes que la longueur d’onde laser (L << λ), l’autre pour des longueurs proches de la longueur d’onde laser (L ≈ λ). La combinaison de ces résultats expérimentaux avec des simulations Particle-In-Cell 2D et 3D à l’aide du code WARP/PICSAR ont par la suite permis d’élucider les deux mécanismes plasmas d’absorption.
Pour les courtes longueurs de gradients L, le champ laser se réfléchit sur un plasma encore confiné et très dense, qui joue le rôle de « miroir plasma« . Dans ce régime, les électrons sont périodiquement expulsés par le champ laser puis ré-accélérés vers l’intérieur du plasma, en absorbant une fraction significative de l’intensité laser. Ce mécanisme est appelé « ‘mécanisme de Brunel« .
Pour des valeurs de L plus élevées, de l’ordre de la longueur d’onde laser, une bonne partie des électrons à l’interface vide-plasma, se trouvent dans une zone de densité sous-critique, dans laquelle le champ incident peut se propager sans réflexion. Ils se retrouvent alors soumis au champ d’interférence entre le champ laser incident et le champ laser réfléchi sur la partie plus interne et plus dense du plasma. Dans ce régime, la dynamique des électrons devient chaotique et ces derniers sont chauffés par chauffage stochastique. Ce processus est illustré Figure ci dessus où sont représentés les trajectoires des électrons du plasma dans l’espace des phases (x, px) lors de l’interaction : x représente la coordonnée normale à la surface du plasma et l’échelle de couleur correspond à la position initiale des électrons dans la cible, ce qui permet d’identifier leurs trajectoires. Cet espace des phases montre une dynamique d’étirement et repliement, aussi appelé ‘pétrissage optique’, responsable de l’apparition de structures en feuillets qui sont une signature claire de l’émergence du chaos lors de l’interaction. Du fait de cette dynamique, deux électrons initialement proches dans l’espace des phases exhibent des trajectoires singulièrement différentes en quelques cycles optiques.
Ces résultats montrent le rôle majeur de la longueur de gradient L dans le mécanisme de couplage. La compréhension fine de ces mécanismes, rendue possible grâce la combinaison de résultats expérimentaux et numériques, permettra d’optimiser les sources de particules et de lumière issues de l’interaction laser-plasma, aux multiples applications.
Référence :
L. Chopineau, A. Leblanc, G. Blaclard, A. Denoeud, M. Thévenet, J-L. Vay, G. Bonnaud, Ph. Martin, H. Vincenti, and F. Quéré,
Phys. Rev. X 9 (2019) 011050.
Cibles réseaux
L’excitation résonnante d’onde de surface pour booster la génération d’harmoniques sur miroir plasma
La plateforme UHI100 permettant de travailler avec des faisceaux laser intenses à haut contraste temporel, nous avons pu explorer la dynamique de l’interaction laser-matière en régime relativiste sur des cibles structurées (des miroirs plasmas « réseaux ») et avons observé pour la première fois expérimentalement une amélioration de la génération d’harmoniques d’ordre élevé induite par des plasmons de surface (SP) sur des cibles en réseau soumises à des intensités relativistes.
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Nos résultats dévoilent le rôle significatif de l’excitation des SP dans la réduction de la perte d’intensité subie par les HHG dispersées par le réseau. Ce phénomène n’augmente pas seulement l’efficacité de la génération de certains ordres harmoniques, mais préserve également leur séparation angulaire par rapport à la fréquence fondamentale du laser. L’accélération simultanée des électrons témoigne de la persistance des effets plasmoniques à des intensités relativistes, même en présence de gradients de densité contrôlés nécessaires pour atteindre une génération efficace d’HHG. Cela introduit une nouvelle dimension à notre compréhension de l’excitation résonante relativiste des ondes de plasma de surface créées par laser, promettant de nouvelles perspectives sur l’interaction complexe entre la lumière et la matière à des intensités extrêmes.
Figure : A gauche, le spectre des harmoniques obtenu à partir d’une simple cible plane (FLAT), collecté dans la direction spéculaire à celle du laser incidente (45°). A droite, le même laser est focalisé sur une cible réseau (G30) à l’angle de résonance (~35°) et collecté dans une direction proche de la tangente à la cible (87°). Le spectre provenant de la cible G30 est composé d’harmoniques d’ordre plus élevé que sur la cible plane (∼ 40). Certaines harmoniques sont d’intensité aussi élevée (harmoniques de 12 à 15) voire plus élevée (harmoniques de 18 à 21) que celles obtenues avec la cible plane. La modulation d’intensité est causée par la diffraction, pour laquelle seules les harmoniques qui satisfont l’équation de réseau sont émises le long de la direction d’observation choisie.
MP comme injecteur d’électrons de haute charge (VLA)
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