CEA
CNRS
Univ. Paris-Saclay

Service de Physique de l'Etat Condensé

Le développement de structures photoniques performantes : filtres, miroir, élément dispersif, guide optique…, nécessite de savoir réaliser des films minces présentant un fort indice de réfraction et une faible absorption optique sur la plus large gamme spectrale possible. Ces structures sont usuellement composées d'une alternance de couches minces présentant un fort contraste d‘indices optiques.

C'est dans ce cadre que s'inscrit le travail fondamental, réalisé au laboratoire CIMAP dans l'équipe NIMPH, via une collaboration internationale avec l’université de l’Ohio (USA), sur la croissance de films minces de Nb2O5 non-dopé et dopé par des ions Terbium Tb3+. Les couches minces sont déposées par pulvérisation cathodique magnétron et leur étude a notamment permis de montrer les liens entre les propriétés optiques de ces films et leur structure.

Se propageant sur de longues distances à la vitesse de la lumière, les photons peuvent être un bon vecteur de transmission d'une information portée localement par des spins électroniques, à condition de savoir convertir l'état de spin local vers un état de polarisation de la lumière et réciproquement.

Une collaboration internationale incluant le Laboratoire des solides irradiés publie dans Physical Review Letters [1] un article détaillant les mécanismes à l’œuvre pour détecter une lumière polarisée circulairement grâce à des dispositifs de spin-optoélectronique de type photodiodes à spin.

 

L’interaction de la lumière visible avec un objet métallique conducteur se traduit par un large spectre d’absorption, pouvant présenter des résonances "plasmon" qui correspondent à des oscillations collectives des électrons proches de la surface du métal. Lorsqu’un tel "plasmon de surface" est excité, une grande quantité d’énergie peut se concentrer autour de points localisés, à une échelle nanométrique bien inférieure à la longueur d'onde utilisée. Il est alors possible de mettre à profit ces résonances pour façonner la matière par des réactions de chimie locale, en particulier des réactions photosensibles.

Les travaux rapportés ci-dessous illustrent l’emploi de tels concentrateurs de lumière comme supports de réactions de photopolymérisation pour la fabrication de nano-objets hybrides d’intérêt technologiques, tels que des capteurs biochimiques, des sources de lumière nanométriques et des interrupteurs pour la photonique.

À la fois organiques et métalliques, les nanoparticules hybrides offrent une large palette de propriétés pour des applications allant de la biodétection à la photonique. Elles restent cependant difficiles à synthétiser et à fonctionnaliser avec précision.

Une large collaboration rassemblant des chercheurs des deux UMRs  CEA-CNRS SPEC et NIMBE, de l’IS2M (CNRS/Université Haute Alsace), du L2n (CNRS/UTT) et de l’ICR (CNRS/Aix Marseille Université), a développé une méthode efficace et précise pour leur donner de nouvelles propriétés, comme les rendre hydrophobes. Pour cela, les chimistes passent par deux étapes successives de polymérisation par la lumière, révélant des fonctions dormantes, permettant d’induire de nouvelles réactions en surface.

L’auto-assemblage de molécules optiquement actives sur des surfaces métalliques ouvre de nouvelles opportunités pour les sources de lumières organiques et les milieux amplificateurs de lumière. La surface d’un métal supporte des plasmons de surface (PPS), excitations électroniques sous forme d'ondes électromagnétiques se propageant le long de la surface. Une collaboration saclaysienne, entre le SPEC/LEPO et l'équipe de Sylvain Barbay du C2N, montre que l’auto-assemblage de molécules spécifiques optiquement actives, permet de maximiser leur couplage électromagnétique avec ces plasmons de surface.

Le milieu ainsi réalisé permet d'atteindre une forte densité de molécules fluorescentes. De plus, le moment dipolaire des molécules est idéalement orienté perpendiculairement à l’interface, selon la direction de polarisation prédominante des PPS. Enfin, cet assemblage des molécules donne naissance à un mode d’excitation collective (exciton ou formation de paires électron-trou) en interaction avec les PPS. La combinaison unique de ces trois caractéristiques permet d’atteindre le régime de couplage fort entre l’exciton et les PPS. Dans ce régime, l’échange très rapide d’énergie entre les molécules et les PPS donne naissance à des modes hybrides qui présentent un grand intérêt fondamental et appliqué en photonique. En particulier l’analyse de l’émission spontanée dans ces modes hybrides permet de clarifier la physique en jeu, dans ces conditions de couplage fort,  sujet fortement débattu actuellement pour la réalisation de sources cohérentes nanométriques.

Les nanoparticules de métaux nobles présentent d’étonnantes propriétés optiques accessibles à tout un chacun au travers des couleurs chatoyantes des vitraux médiévaux. Dans cet exemple, le rendu des couleurs est lié à l’occurrence de résonances plasmons, une oscillation collective des électrons de conduction du métal sous l’influence d’un champ électromagnétique externe, ici la lumière du jour. Au-delà du domaine artistique, la plasmonique offre la possibilité de manipuler la lumière à l’échelle du monde nano. Cette perspective impose de comprendre plus avant la physique régissant ce phénomène, de concevoir des modèles théoriques susceptibles d’appréhender l’optique de petits objets et de développer des méthodes de caractérisations expérimentales haute résolution du champ proche optique.

Nos travaux visent à répondre à ces trois attentes. Sur un plan théorique, l’ingénierie du champ proche optique d’objets de tailles nanométriques peut être conduite quantitativement par simulation numérique au moyen de méthodes avancées telles que la méthode des différences finies dans le domaine temporel (Finite Difference Time Domain FDTD) ou l’approximation dipolaire discrète (Discrete Dipole Approximation DDA). Ces méthodes, toutefois, sont lourdes d’implémentation et requièrent des ressources informatiques conséquentes. Ce travail propose une méthode simple d’analyse du champ proche optique basée sur la théorie des groupes. Elle permet de prédire et d’interpréter le comportement plasmonique d’une particule de symétrie finie en quelques minutes seulement.

La première étape consiste en l’identification des symétries de l’objet et du champ excitateur. Ces éléments permettent la détermination des états propres symétriquement adaptés associés aux résonances plasmons de l’objet d’étude selon une démarche équivalente à celle mise en œuvre en chimie pour le calcul des orbitales moléculaires par combinaison d’orbitales atomiques. Ces états représentent la distribution de charges induites à résonance. Les paramètres de l’illumination, c’est-à-dire la longueur d’onde et la polarisation du champ incident, autorisent la manipulation sublongueur d’onde du champ optique par adressage sélectif de modes plasmons.

Ces prédictions sont confrontées aux réponses plasmoniques réelles de nano-objets de différentes géométries et tailles : cube, prisme… étudiées par microscopie de photoémission d’électrons (PhotoEmission Electron Microscopy PEEM), une microscopie électronique non intrusive d’une grande résolution spatiale au regard des grandeurs optiques manipulées.

C’est bien connu, l’or brille et c’est l’une des raisons de son succès ! A l’état de nanoparticule, son aspect "doré" disparait, mais sous forme de nanoparticules il présente des propriétés de luminescence assez inattendues, compte-tenu de son très faible rendement quantique (10-10) pour la réémission d'un photon après excitation.

Ainsi, une très forte luminescence visible (centrée dans le vert) est observée après excitation par des photons infrarouge de nanobâtonnets d'or : le signal d’un bâtonnet unique (10 nm x 40 nm) excède plus précisément de quelques millions le signal d’un fluorophore tel que la fluorescéine. Lors de son travail de thèse, Céline Molaro, a mené des études approfondies qui ont permis d’identifier l’origine de ces effets, et le rôle joué par les modes plasmons des nano-objets uniques étudiés, lors de l'absorption et de l'émission de lumière.

Les recherches sur les propriétés optiques des objets nanométriques de métaux nobles sont aujourd'hui très actives. En effet, si leur taille est très inférieure aux longueurs d'onde de la lumière visible, leurs électrons développent des oscillations à la fréquence de la lumière (modes plasmons). On obtient ainsi un couplage direct entre les oscillations électroniques de courte longueur d'onde au sein des nanostructures et les ondes électromagnétiques, reçues ou émises. L'effet est d'autant plus intense, que l'on sait optimiser les effets d'antenne.

Ces propriétés sont fortement influencées par la forme des objets : anisotropie de forme, effets de pointe... Le façonnage de la matière à l'échelle nanométrique par faisceau d'ions est ainsi une technique intéressante car elle permet de réaliser au cœur d'un substrat irradié, des nano-objets filaires dont on peut contrôler l'orientation spatiale.La maîtrise des procédés de fabrication par irradiation ouvre une voie pour l'élaboration de matériaux nano-composites, premier pas vers la réalisation de composants "optique" à l’architecture tridimensionnelle.

Une collaboration entre le LSI, l'Université de Tampere (Finlande), le LPS et le LPN montre que ces équipes ont aujourd'hui une parfaite maitrise de la réalisation de réseaux ordonnés de nanofils. Ils ont notamment caractérisé l'évolution angulaire de la génération de second harmonique des nano-antennes d'or individuelles, réalisées par irradiation ionique et intégrées dans une matrice diélectrique.

 

Un nombre croissant d’applications industrielles ou scientifiques nécessitent de fortes puissances laser dans différentes gammes de longueurs d’onde, notamment dans le proche et moyen infra-rouge ainsi que dans le visible. Les sources laser à fibre dopée sont des systèmes robustes et efficaces qui allient une puissance élevée à une très bonne cohérence spatiale. La spectaculaire montée en puissance de ces sources ces dernières années se limite néanmoins à quelques longueurs d’onde situées entre 1 μm et 2 μm. L'équipe LIOA du laboratoire CIMAP, en collaboration avec l’entreprise Ixfiber*, a développé une source laser à fibre accordable en longueur d’onde entre 872 nm et 936 nm et  délivrant jusqu’à 22W de puissance de sortie. Ces résultats constituent un record dans ce domaine de longueur jusqu’alors peu exploré.

 

Les technologies silicium pour l'électronique sont aujourd'hui matures et on ne peut que souhaiter étendre leur champ d'application à la photonique. Dans ce cadre, il est nécessaire de disposer de dispositifs de génération de seconde harmonique permettant notamment d'accroître la sélectivité des signaux. Cependant la susceptibilité du second ordre χ(2) est nulle dans un cristal à symétrie centrale comme le silicium, mais une collaboration de chercheurs de l'IRAMIS/LSI, des Universités de Modène, Trento, Brescia et Berkeley, a montré théoriquement et expérimentalement qu'en distordant la structure du cristal de silicium, il est possible d'obtenir des guides d'ondes permettant ce doublage de fréquence.

 

Dans le domaine de la nanophotonique, l'organisation spatiale de molécules optiquement actives,  permet de contrôler et renforcer leur activité (par exemple pour la conversion de l’énergie solaire). Ceci peut être réalisé par dépôt sur une surface, mais les molécules doivent rester isolées de celle-ci pour fonctionner efficacement. Une équipe du Laboratoire de chimie des polymères (CNRS / Université Pierre et Marie Curie) et des chercheurs de l’Institut Rayonnement Matière de Saclay (IRAMIS/SPCSI, CEA) proposent une stratégie originale pour contrôler l’organisation des molécules déposées sur une surface tout en préservant leur fonctionnalité. Pour cela, ils réalisent des tectons [1] tridimensionnels possédant une face qui contrôle l’auto-assemblage sur la surface, l’autre face étant constituée par la molécule active. Les deux entités sont reliées entre elles par un pilier de longueur variable pour découpler efficacement la composante active de la surface. Ces travaux font l’objet d’une publication dans la revue Angewandte Chemie International Edition.

Ludovic Douillard1, Fabrice Charra1, Zbigniew Korczak1, Renaud Bachelot2, Sergei Kostcheev2, Gilles Lerondel2, Pierre-Michel Adam2 and Pascal Royer2

1CEA-Saclay, DSM/IRAMIS/SPCSI Service de Physique et Chimie des Surfaces et Interfaces,
2Laboratoire de Nanotechnologie et d’Instrumentation Optique, ICD CNRS FRE 2848, Université de Technologie de Troyes

 

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