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Univ. Paris-Saclay

Les lasers à l'IRAMIS


Dossier : Les lasers à l'IRAMIS
B. Carré, P. Monot, P. d'Oliveira, & L. Barbier (Juin 2010)

Le dossier "Laser à l'IRAMIS " au format PDF

Dossier : les lasers à l'IRAMIS

Les lasers de puissance à SACLAY
Pascal D'Oliveira et Bertrand Carré

 

 

Laser UHI (Ultra-Haute Intensité) Saclay
Etages amplificateurs du laser UHI (Ultra-Haute Intensité) à Saclay

Au cours des quarante dernières années, les lasers de puissance, qui délivrent l’énergie lumineuse sous la forme d’impulsions de très courte durée, ont permis le développement d’une nouvelle branche de l’optique, dite "non linéaire". Ce domaine de recherche vise à étendre l’étude de l’interaction de la matière et la lumière au cas de champs électromagnétiques très élevés, qui peuvent devenir comparables au champ électrique intra-atomique. On parle d'interaction laser-matière "en champ fort".

Dès les années soixante, le groupe de Gérard Mainfray et Claude Manus a compris tout l’intérêt des lasers de puissance pour explorer ces nouveaux domaines. Il s’équipe de lasers à rubis et, rapidement, des premiers lasers en verre dopé au Néodyme fabriqués par la CILAS. Ces lasers ont beau être rudimentaires, ils délivrent quand même une énergie par impulsion de l’ordre du Joule en une dizaine de nanosecondes ! C’est avec ce type de laser que l’équipe de Saclay fera l’une des premières observations de l’ionisation multiphotonique d’un gaz : dans ce processus non linéaire, l’atome qui, en champ faible, ne peut pas être ionisé par l’absorption d’un seul quantum d’énergie - le photon du champ laser - est ionisé en champ fort par absorption simultanée de plusieurs quanta. L’équipe de Saclay va s’illustrer particulièrement dans l’étude de ce phénomène en associant étroitement théoriciens et expérimentateurs.

Plusieurs développements s’ensuivent dans les années 1970, qui conduisent à un meilleur contrôle de la cohérence, à l’extension du domaine spectral et à la réduction de la durée d’impulsion à quelques picosecondes. Les éclairements atteints – flux d’énergie par unité de surface – sont alors de 1015 W/cm2 ! Ils permettent à P. Agostini et à ses collègues de publier en 1979 la première observation de l’ionisation multiphonique « au-dessus du seuil ». Dans ce processus, l’atome absorbe un nombre de photons supérieur à celui qui correspond au seuil d’ionisation, les quanta d’énergie en excès étant captés par l’électron éjecté.

La course aux très forts éclairements est désormais lancée entre les meilleurs laboratoires mondiaux. L’équipe de Saclay sait se maintenir aux premiers rangs. A la fin des années 80, elle s’implique dans deux opérations importantes. Tout d'abord, l’équipe et ses partenaires, LOA et FOM d’Amsterdam, montent le premier réseau européen « lasers femtosecondes », une initiative qui permettra le perfectionnement des plusieurs technologies laser. Dans le même temps, l’équipe construit le premier laser européen basé sur la technologie « CPA » (Chirped Pulse Amplification), introduite aux Etats-Unis par G. Mourou. Ayant à l’origine une puissance de 1TW (1TW=1012W) à la cadence d’un tir par minute, ce laser UHI (pour Ultra Haute Intensité), a intégré depuis les diverses avancées de la technologie : il délivre des impulsions de 10 TW à la cadence de 10 Hz.

En 1987, grâce à ces lasers, un processus non linéaire très spectaculaire, la génération d’harmoniques d’ordre élevé dans un gaz atomique, est observé simultanément à Chicago et à Saclay. Ce phénomène se produit lorsqu’un faisceau laser très intense est focalisé dans un jet atomique de gaz rare, par exemple de néon. Dans un premier temps, ce déferlement de lumière "secoue" les électrons qui absorbent l’énergie des photons reçus et s’éloignent du noyau auquel ils sont liés. Dans un deuxième temps, ces électrons retournent à leur niveau d’énergie de départ en réémettant l’énergie supplémentaire qu’ils avaient absorbée. Mais les photons ainsi restitués ne sont pas semblables aux photons d’origine : leur énergie est un multiple entier de celle des photons incidents. Les atomes se sont donc comportés en définitive comme des convertisseurs de fréquence : leurs électrons ont absorbé chacun un grand nombre de photons incidents mais ne réémettent qu’un seul "gros photon" plus énergique. Des harmoniques d’ordre élevé sont ainsi engendrées, jusqu’à atteindre des fréquences proches de celles des rayons X.

Enfin, les éclairements supérieurs à 1017W/cm2 qui définissent le domaine UHI ont permis à l’équipe de Saclay d’aborder la physique des plasmas produits par lasers, qui restent toujours en 2010 un objet d’étude privilégié. C’est dans ce cadre que l’équipe s’attachera à produire le phénomène d’autofocalisation relativiste d’un faisceau laser dans un milieu fortement ionisé, et qu’elle y parviendra sur la chaîne laser P102 de la DAM.

Par ses travaux sur les lasers de puissance et l’interaction laser-matière en champ fort, le groupe de G. Mainfray a fondé à Saclay une tradition d’excellence qui ne s’est pas démentie. Elle se confirme même aujourd’hui, puisque plusieurs serveurs laser femtosecondes sont installés à Saclay (DSM/IRAMIS) qui, avec des caractéristiques variées d’énergie et de longueur d’onde, répondent aux besoins des différentes communautés de chercheurs. Il est donc légitime de dire que ce pôle laser pluridisciplinaire, fortement lié à ses voisins en Ile-de-France, en France et en Europe, doit ainsi beaucoup aux pionniers de Saclay.

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